Ce sont des opérations menées dans certains quartiers de l’agglomération lyonnaise, mais appelées à être conduites un peu partout, qui consistent à épandre de nuit un insecticide très puissant, la deltaméthrine, avec un impact sur l’homme mal connu pour la dose employée, et d’ailleurs on impose aux habitants de rester confinés, de rentrer le linge, les animaux domestiques, etc. La raison, c’est évidemment la dengue, cette maladie d’origine tropicale dont on a observé un cas chez une personne revenant de Cuba, et dont on craint que le moustique tigre ne la propage. Sauf qu’on déploie une méthode qui ne se soucie pas des effets collatéraux.
La dengue est une maladie sérieuse, mais réellement grave dans seulement 1% des cas et qu’on sait la traiter. On n’est pas sous la menace d’une épidémie d’Ebola. Face à cela, on emploie un insecticide non spécifique du moustique qu’on répand largement, sans se demander l’impact sur le reste de la biodiversité ; une biodiversité qui est déjà, surtout en ville, en très mauvais état. On va donc toucher aussi bien les abeilles, les coccinelles, les chauves-souris, les oiseaux…
Tout l’écosystème est touché, y compris les prédateurs du moustique, comme si le but était d’avoir une ville zéro-insecte, donc zéro biodiversité, par précaution. C’est contradictoire avec les politiques zéro pesticides dans l’espace public, c’est risquer un impact hors de proportion avec le risque encouru. On reste dans une logique à l’ancienne « si un animal me gêne, sans me poser de questions je les tue tous ». On ne peut pas se permettre ça. Tout tuer, ce n’est pas nous protéger, c’est nous détruire nous-mêmes. Et on n’est pas sûr du tout de toucher la cible.
Il faut comprendre qu’on agit sur des réseaux vivants. Ces réseaux sont une partie de la solution. Pour ça, il ne faut pas les détruire. En premier lieu, savoir que le moustique tigre pond dans quelques centimètres d’eau, plutôt que dans les mares et les étangs où d’ailleurs, ses pontes seraient confrontés à des prédateurs comme les amphibiens ou certaines punaises.
Donc surtout ne pas s’attaquer aux mares en croyant se protéger. Ce qui plaît à ce moustique, ce sont les déchets creux pleins d’eau de pluie, les pots de fleurs, les bidons de jardin. C’est ce qu’il faut éliminer. Il n’y a de toute façon pas de solution miracle. Tuer jusqu’au dernier moustique signifierait passer le monde au lance-flammes. Favoriser les équilibres naturels, les milieux naturels sont la seule réponse sensée à ce genre de déséquilibre que nous avons provoqué en disséminant chez nous un moustique venu d’ailleurs.
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