StopCovid, application française de traçage contre la propagation du coronavirus, suscite de nombreuses craintes. Respecte-t-elle la vie privée et nos données personnelles ? Si la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des libertés) a donné son feu vert la Ligue des droits de l’Homme (LDH) s'oppose à une forme de "solutionnisme technologique". Explications.
En cause, la protection des données personnelles : pour Maryse Artiguelong, "apparemment il y a quand même des risques au niveau des garanties". Si "des tests ont été faits", ils ont été réalisés "sur une trentaine de portables", précise la vice-présidente de la LDH, "ça n'a rien à voir avec l'échelle de ce que souhaite le ministre et le gouvernement". Pour que l'application soit efficace, il faut en effet qu'un grand nombre de personnes l'utilisent.
Téléchargeable gratuitement - et sur la base du volontariat - par tous les détenteurs de smartphone, StopCovid fonctionne grâce à la connexion bluetooth : elle détecte les autres détenteurs de l'appli que l'on croise dans les lieux publics ou autres. Ce traçage de la population, associé aux informations médicales que les détenteurs de l'applications sont amenés à enregistrer, permettrait de suivre la propagation du virus, et d'éviter une seconde vague de contamination.
"Tous les petits bouts de liberté que l'on abandonne en période d'état d'urgence, que ce soit en état d'urgence sanitaire ou en état d'urgence de lutte contre le terrorisme ou autre, on ne les récupère jamais", prévient Maryse Artiguelong qui se dit "pessimiste" quant à "la date à laquelle on va nous annoncer que cette pandémie est terminée". L'application n'a pas vocation à être utilisée au-delà de six mois après la fin de la crise sanitaire.
"Le solutionnisme technologique qu'on dénonce, je crains qu'il soit repris à n'importe quelle occasion." Ce qui inquiète la LDH c'est la perspective d'une surveillance à la chinoise. Quand on confie à des algorithmes le soin de notifier qui ne porte pas le masque ou de repérer la températeure corporelle des individus... Au-delà du non respect de la vie privée, cela peut donner lieu à des erreurs : "Quelqu'un qui a 37,5°C n'a pas forcément le Covid-19 !" "Je pense qu'il y a une orientation vers une surveillance à la chinoise qui me paraît très inquiétante, et que l'épidémie renforce l'acceptabilité de cette surveillance."
Quelles solutions pour éviter une seconde vague de l'épidémie sans avoir recours à la technologie ? "La confiance se gagne par la pédagogie", estime Maryse Artiguelong, qui note que, jusq'à présent, "les Français ont été très raisonnables". Les parlementaires doivent se prononcer ce mercredi.
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