« Que dois-je faire face à cette catastrophe ? » Telle est la question posée par le pape François dans sa réponse du 10 juin au cardinal Marx qui lui avait proposé sa démission quelques semaines plus tôt. Il faut lire avec attention cet échange magnifique de haut vol entre le pape François et l’archevêque – confirmé désormais – de Munich.
Le cardinal Marx avait proposé sa démission dans le contexte de la très grave crise des abus qui secoue l’Église catholique allemande, comme c’est le cas aussi en France et bien ailleurs. Il pointe "un échec institutionnel" avec des "échecs sur le plan personnel".
"Fondamentalement, il s'agit pour moi d'assumer une coresponsabilité par rapport à la catastrophe des abus sexuels". D’autant qu’il n’est pas possible de "reléguer les griefs simplement dans le passé et chez les fonctionnaires de l'époque, et de les enterrer ainsi ». Le tournant pour sortir de la crise, selon le cardinal : " seulement celui de la 'voie synodale', une voie qui permet vraiment le discernement des esprits". "Cependant, ce changement de perspective n'a pas encore porté ses fruits. La négligence et le mépris des victimes ont certainement été notre plus grande faute dans le passé", regrette-t-il.
Dans la réponse du 10 juin, refusant sa démission, le pape François remercie son frère et ami pour son "courage chrétien qui ne craint pas la croix, qui ne craint pas d'être humilié devant la terrible réalité du péché". François rappelle que "l'Église d'aujourd'hui ne peut pas faire un pas en avant sans assumer cette crise" car la politique de l'autruche ne mène nulle part, et la crise doit être assumée par notre foi pascale. Personnellement et communautairement.
"Se rendre compte de cette hypocrisie dans notre façon de vivre notre foi est une grâce, c'est un premier pas que nous devons faire. Nous devons nous approprier l'histoire… Accepter, signifie se mettre en crise". Ce faisant, explique le Pape, "nous ressentirons cette honte qui guérit et ouvre les portes à la compassion et à la tendresse du Seigneur[…] C'est pourquoi, à mon avis, chaque évêque de l'Église doit l'assumer et se demander : que dois-je faire face à cette catastrophe ?" Chaque évêque et chacun de nous, à sa place.
À l’heure où la commission indépendante, la CIASE, conclut ses travaux, écrit son rapport et ses préconisations afin de les rendre publiques à l’automne, il est indispensable de prendre la mesure de cet échange entre le cardinal allemand et le pape argentin. La mesure justement de la responsabilité, de la coresponsabilité et de ses conséquences actives qui demandent courage et détermination. Qui imposent notre implication corps et âme, quitte à en souffrir. Mais de toute façon si peu par rapport aux victimes et leurs proches.
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