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Attentats de Charlie Hebdo : "Ne pas oublier les héros de la liberté d'expression"

Un article rédigé par Claire le Parc - RCF Bretagne, le 7 janvier 2025 - Modifié le 7 janvier 2025

C'était il y a 10 ans. Les 7, 8 et 9 janvier 2015, 17 personnes étaient tuées par des terroristes dans la rédaction et aux abords du journal Charlie Hebdo, à Paris. A l'époque, de nombreux dessinateurs avaient sorti le crayon pour rendre hommage aux victimes. Parmi eux : Nono, caricaturiste pour le Télégramme. 

Dessin réalisé par NonoDessin réalisé par Nono

Nono, depuis 1997 vous croquez l'actualité dans les colonnes du Télégramme. Il y a 10 ans, vous rendiez hommage, par le dessin, aux victimes de l'attentat de Charlie Hebdo. Racontez-nous, pour commencer, comment avez-vous vécu cet événement ? 

C'était un mercredi. Je préparais à manger, je m'en souviens bien. J'écoutais la radio quand j'ai entendu parler d'un attentat à Charlie Hebdo. J'ai commencé à entendre des noms, celui de Cabu par exemple. J'ai allumé la télévision et vu les images. C'est à ce moment-là que j'ai réalisé le drame terrible... Une heure après, la rédaction du Télégramme me demandait un dessin. J'ai pensé à un dessin que j'avais fais sur ce qui se passait en Algérie dans les années 90, quand le Groupe Islamique armé assassinait des artistes, des journalistes, des écrivains. J'avais, à l'époque, dessiné un stylo criblé de balles. J'ai repris ce stylo mais son encre rouge se répandait dans les rues de Paris. Ce dessin a été mis sur le site mais j'ai continué à dessiner. J'ai ressenti, à ce moment-là, le besoin de m'exprimer, de témoigner de ma solidarité. Je dessinais, en pensant à ces héros de la liberté d'expression. 

Vous vous êtes senti attaqué, ce jour-là, dans votre profession, dans votre art ? 

Oui, bien sûr. C'est la première fois qu'une rédaction était décimée... A l'époque Charlie Hebdo devait tirer à 30 000 exemplaires. Après l'attentat, il s'est vendu à 8 millions. C'est intéressant et presque malsain... 8 millions de personnes se sont ruées dans les kiosques pour acheter cet objet un peu fétiche mais après elles se sont désintéressées du journal. En tout cas, beaucoup de gens ont découvert, le 7 janvier 2015, la profession de dessinateur de presse. 

Cet événement a-t-il changé votre façon de travailler ? 

Nous avons tous une forme d'auto-censure. Nous sommes le fruit d'une éducation, d'une morale, d'une culture, d'une religion... Mais je pense, en effet, qu'après l'attentat, il y a eu une forme de retenue dans beaucoup de journaux, pour ne pas heurter le lectorat. Nous sommes aujourd'hui dans une plus grande tiédeur. 

Pour Laurent Bihl, spécialiste de la satire à l'Université Paris 1er Panthéon Sorbonne, le combat des caricaturistes a changé. Selon lui, ils doivent lutter contre l'indifférence ambiante et non plus contre la censure législative. Partagez-vous cet avis ? 

Oui, tout à fait. L'indifférence me semble être un terme très juste. Le dessin de presse n'est pas consensuel. Il est là pour faire réagir, réfléchir, ouvrir le débat. Il est par nature irrévérencieux. Depuis le 7 janvier 2015, je suis intervenu dans une centaine d'établissements scolaires pour parler aux élèves de liberté d'expression. Quand je vais dans ces écoles, je me sens citoyen, dessinateur citoyen. Il y a des lois pour règlementer notre liberté d'expression. Ce n'est certainement pas à deux sauvages munis de Kalachnikov d'établir leur propre loi et de nier l'Etat de droit dans lequel nous vivons et dans lequel nous dessinons. 

Nono, avez-vous des attentes pour cet "anniversaire"?

C'est un terrible anniversaire mais il est important de se souvenir. Les dessinateurs de Charlie Hebdo étaient des pacifistes et continuaient à se battre pour la liberté d'expression. Pour moi, ce sont des résistants de la pensée dogmatique. Nous avons perdu des amis mais aussi des gens qui représentaient un combat. 

 

 

 

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