Le parquet a rendu des réquisitions sévères contre l'ancien prêtre accusé d'agressions sexuelles sur mineurs.
La vice-procureure Dominique Sauves l'a répété dans son réquisitoire : ce procès Preynat est "hors du commun". C'est sans doute avec cette grille de lecture qu'il faut analyser cette semaine d'audiences.
Ce procès de Bernard Preynat aura été exceptionnel à plusieurs titres pour un dossier de pédocriminalité. Dans sa durée tout d'abord, quatre jours, qui ont permis à chaque partie de présenter longuement ses arguments. La comparaison avec un procès d'assises a même été suggérée par plusieurs acteurs du procès. Pour Me Yves Sauvayre, avocat de Stéphane Hoarau, l'une des victimes, cette semaine aura été exemplaire.
"Par le nombre de victimes, par le nombre d’agressions pour chaque victime, par la durée de la période des faits – 30 ans – et enfin par le contexte institutionnel dont Bernard Preynat a pleinement profité", ce dossier Preynat est "stupéfiant, grave, effrayant" a répété la vice-procureure. Cet homme a mis en place "une structure, un système qui lui a permis d’assouvir ses pulsions et qui garantissait un vivier toujours alimenté de petites victimes". "La réponse pénale doit être forte, a demandé Dominique Sauves, à la mesure du calvaire des victimes".
Au moins 8 années de prison ferme est d'ailleurs une réquisition plutôt sévère selon plusieurs avocats du procès, pas très éloignée de la peine maximale encourue de dix ans, surtout pour des faits qui datent d’il y a trente ans et pour un homme âgé de 74 ans.
De son côté, l’avocat de Bernard Preynat, Me Frédéric Doyez, a insisté dans sa plaidoirie sur la fin des délits de son client en 1991 : "il n’a pas attendu d’être jugé et condamné pour arrêter ses agressions sexuelles. Il a pris un engagement auprès de Mgr Decourtray et il l’a tenu" a affirmé Me Doyez.
"Il y a un moment où il faut reconnaître aux gens une volonté de changer. [...] La place de Bernard Preynat est dans la communauté des hommes" a-t-il expliqué.
Bernard Preynat a conclu lui-même son procès, prenant la parole en dernier comme le prévoit la justice française pour le prévenu. L'ancien curé a dit "être venu au tribunal avec le désir d’être loyal. Je n’ai pas menti dans mes réponses et j’ai été sincère, avec les limites de ma mémoire. Je réitère ma demande de pardon du fond du cœur. Je regrette sincèrement d’avoir pris du plaisir sexuel dans des actes condamnables et je présente mes excuses aux victimes, mais aussi aux prêtres, au diocèse de Lyon et à l’Eglise que j’ai salie par mes agissements. Depuis 1991, j'ai été fidèle à la promesse faite à Mgr Decourtray [de ne pas recommencer]" a-t-il déclaré à la barre.
Un acte de contrition qui contraste avec le réquisitoire explicite de la vice-procureure quelques heures plus tôt. Dominique Sauves a au contraire trouvé l’ancien prêtre "bien combatif pour un homme qui se présente aujourd’hui comme repentant. Il s’est servi de la foi, des valeurs du scoutisme et de l’éthique religieuse, pour s’en affranchir allègrement. Il n’est rien d’autre qu’un pédophile en série » a-t-elle asséné.
Quelle que soit la décision du tribunal, ce procès a été un soulagement pour les victimes. Comme pour Alexandre Hezez, le lanceur d'alerte en 2014 auprès du diocèse de Lyon. Il a assisté au procès de son agresseur depuis les bancs du publics, car les faits dont il a été victime sont couverts par la prescription.
La décision du tribunal correctionnel de Lyon sera rendue le lundi 16 mars prochain.
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