C’est un mouvement inédit. A partir du 3 juin prochain, les hôpitaux privés de France menacent de faire grève. L’annonce des tarifs de remboursement du secteur privé par l’Assurance maladie pour 2024 a déclenché la colère des médecins et des syndicats. 0,3 % annoncé, c’est quatorze fois moins que pour l’hôpital public. La région compte 29 hôpitaux privés, pour certains seuls à occuper le territoire.
Des opérations déprogrammées, des urgences fermées et des services entiers en grève. Voilà le scénario qui se profile dans plus de 1030 cliniques privées de France, à partir du 3 juin prochain. Un mouvement de “grève totale” historique à l’appel de la fédération de l’hospitalisation privée de France. A l’origine de ce mouvement, l’annonce le 27 mars dernier par Frédéric Valletoux, le ministre délégué chargé de la santé, que les prix payés par la Sécurité sociale pour les actes effectués dans les hôpitaux privés ne seront revalorisés que de 0,3 % en 2024, contre 4,3 % pour les hôpitaux publics.
Le gouvernement justifie ce tour de vis budgétaire par les contraintes qui pèsent sur les finances publiques. “Cette décision aux conséquences désastreuses, prise sans aucune concertation avec les acteurs du secteur, aggrave une situation déjà critique, dénonce la fédération de l’hospitalisation privée (FHP) dans un communiqué, où les charges augmentent de façon exponentielle tandis que les tarifs demeurent insuffisants pour assurer une gestion viable des établissements.” A l’appui de son appel, le syndicat avance que la part d’hôpitaux privés en déficit, qui est passée de 25 à 40 % entre 2021 et 2023, “atteindra dans ces conditions le niveau alarmant de plus de 60 % en 2024”.
En France, dans les hôpitaux privés conventionnés, c’est-à-dire l’immense majorité d’entre eux, les tarifs des actes sont fixés par l’État, et la facturation y est contrainte. Mais avec l’inflation, les charges ont considérablement augmenté, alourdies par des tarifs de l’énergie qui ont explosé, 20 % de hausse en 2023 pour l’exemple de l'hôpital privé de Cesson-Sévigné. La disparité entre public et privé ne passe pas, après avoir fait front commun entre public et privé pour faire face à la crise sanitaire.
“Ne nous trompons pas de combat, prévient Yann Béchu, directeur de l’hôpital privé Sévigné, membre du groupe hospitalier Vivalto Santé. Nous participons au service public, à Saint-Grégoire et Cesson-Sévigné (où sont implantés les deux sites des Hôpitaux Privés Rennais NDLR), nous avons des services d’accueil d’urgence, on accueille 55 % des urgences adultes de Rennes, on fait 2100 accouchements par an, 40 % des chirurgies en cancérologie, 55 % de la chirurgie totale. On compte dans le paysage !”
Selon Lamine Gharbi, le président de la Fédération de l’hospitalisation privée, 60 % des cliniques sont en déficit et risquent de fermer. “S’il n’y a pas de réaction, on devra montrer notre place dans l’hospitalisation en France, hélas, de façon désagréable, poursuit Yann Béchu. Pour montrer que l’on compte, et que dans certains territoires, on est seuls. Dans le groupe Vivalto santé, on pense à Pontivy, Dinan ou Chateaubriant, où nous sommes seuls sur le territoire. Tout ce qu’on demande, c’est être traité comme le public, qui est déjà sous doté.” Une grève totale, prévoient les hôpitaux à partir du 3 juin.
1030 établissements sont concernés en France, ainsi que plus de 200 000 professionnels, dont 40 000 médecins libéraux. Seules certaines activités vitales comme la dialyse, ou la cancérologie, seraient maintenues pendant la grève, si le gouvernement ne fait pas marche arrière d’ici-là.
RCF est une radio associative et professionnelle.
Pour préserver la qualité de ses programmes et son indépendance, RCF compte sur la mobilisation de tous ses auditeurs. Vous aussi participez à son financement !