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Christophe Oberlin: "A Gaza, il y a un phénomène d'épuisement généralisé"

RCF,  - Modifié le 1 juin 2018
Les septièmes prix littéraires de l’œuvre d’Orient ont été remis dimanche dernier à Notre-Dame de Paris par Mgr Michel Aupetit. Une mention spéciale a été accordée à Christophe Oberlin.
Christophe Oberlin - Camille Dujoncquoy RCFChristophe Oberlin - Camille Dujoncquoy RCF

A Gaza, un appauvrissement absolument dramatique

Christophe Oberlin est l’auteur du livre "Chrétiens de Gaza" (éd. Erick Bonnier). Ce dernier est chirurgien orthopédique, spécialiste de la main, amoureux de Gaza. Il y va très régulièrement, tous les quatre mois, trois fois par an, depuis seize ans. "Je suis chirurgien spécialisé dans les réparation des blessures de guerre, et j’ai toujours circulé. Je suis allé en Algérie, en Inde, au Sud du Sahara. Et la première fois que je suis allé à Gaza, les Palestiniens sont venus avec des listes de blessés" explique-t-il.

Sur place, "il y a un appauvrissement absolument dramatique. Tout l’emploi privé et public a disparu. On aboutit à un phénomène d’épuisement généralisé. On voit chuter le nombre de bacheliers, le nombre d’entrées à l’université. La mortalité augmente, les effets sanitaires du manque d’eau potable se font sentir" ajoute le praticien.
 

Aucun avenir pour les jeunes de Gaza

Depuis la fin du mois de mars, la situation s’est dégradée à Gaza. Le 14 mai, alors qu’était inaugurée la nouvelle ambassade à Jérusalem, les tirs israéliens faisaient 62 morts à Gaza. On parle de crime de guerre de la part d’Israël. Le 22 mai dernier, l’autorité palestinienne à Gaza a demandé une enquête à la Cour pénale internationale. "C’est un grand événement car cela fait des années que l’autorité palestinienne aurait pu saisir la Cour pénale internationale. Par plusieurs fois elle a bloqué des plaintes envoyées par les Palestiniens. Dans une espèce de retournement historique, ils ont enfin accepté de signer l’article 14. C’est un point véritablement historique car c’est très rare que des États portent plainte" analyse Christophe Oberlin.

On dit aujourd’hui de Gaza que c’est une prison à ciel ouvert. "Cela veut dire que par exemple, pour les jeunes que je fréquente, il n’y a aucun avenir pour eux. Jamais ils n’auront d’emploi. On montre ces jeunes qui sont à la frontière, qui jettent des cailloux, qui meurent. On montre les amputés. C’est terrible mais il faut savoir que derrière il y a une population hautement éduquée. Ces morts sont nécessaires pour que l’opinion publique s’en empare. Au moment de l’inauguration de l’ambassade, s’il n’y avait pas eu de photos de Gaza, cela aurait fait un entrefilet, malheureusement" lance le chirurgien.
 

A Gaza, "les chrétiens n'attendent rien aujourd'hui"

Dans son ouvrage "Chrétiens de Gaza", Christophe Oberlin explique que les chrétiens sur place sont très peu nombreux, mais ils sont très importants. "Un Gazaoui sur mille est chrétien. J’ai essayé à travers mes livres de prendre un thème qui humanise. C’est une vision de l’intérieur. Ils sont fondus dans la société de Gaza. Les deux confessions, chrétienne et musulmane, sont intimement liées sur place. Le fait d’être chrétien n’est pas un inconvénient" précise-t-il.

Il ajoute qu’"ils subissent ce conflit comme les autres. Lors de la guerre de 2014, le nombre de chrétiens tués par les bombardements israéliens correspond exactement à leur proportion dans la population. Bien entendu, ils ont des relations différentes avec l’extérieur. L’accès aux lieux saints est un énorme problème. Il y a souvent une grande propagande lancée en donnant quelques permis. En pratique, cela ne se passe pas du tout comme ça. Ils sont soumis à la même humiliation permanente, de sorte que certains ont abandonné l’idée d’aller dans les lieux saints".

Pour conclure, Christophe Oberlin explique qu’"il n’y a aucune tension avec la communauté musulmane. Bien entendu, de la même façon que nous pouvons vivre en France des attentats horribles, il y a eu des tentatives dans ce sens. Il y a des fous furieux. Cela existe. Les chrétiens n’attendent rien aujourd’hui. Ce sont des arabes, ce sont des palestiniens".

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