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Comment réduire l’abstention ?

Un article rédigé par Clotilde Dumay - RCF,  - Modifié le 28 juin 2021
Le dossier de la rédactionComment réduire l’abstention ?
Après un taux d’abstention record de plus de 66% au premier tour des élections régionales et départementales, des propositions émergent pour réformer le système électoral français.
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C’est certainement la grande gagnante de ce premier tour des élections régionales et départementales : l’abstention. Dimanche 20 juin, plus de 66 % des Français ne sont pas allés voter. Du jamais vu pour un scrutin sous la Ve République, hors référendums.

"Les électeurs se sentent de moins en moins représentés et ont de moins en moins le sentiment que les élections permettent de changer la vie, observe Jean-Yves Dormagen, professeur de science politique à l’université de Montpellier, et spécialiste de l’abstention. Il y a une forme de banalisation de l’alternance depuis trois décennies, on a l’impression que les changements de majorité ne produisent pas de changements politiques. Et puis il y a une déstructuration des grands clivages politiques. Or, on sait que les élections qui font voter sont celles dans lesquelles les candidats sont très clivants."

Transformer l’engagement des jeunes en politique

En regardant plus précisément le profil des abstentionnistes, un chiffre interpelle : 87 % des 18-24 ans ne sont pas allés voter, au premier tour des élections régionales et départementales. "Toutes les catégories d’âge actives témoignent d’une défiance forte à l’égard du personnel politique, confirme Laurent Lardeux, spécialiste de l’engagement, des valeurs et de la socialisation politique des jeunes, à l’Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (INJEP). En même temps, cela témoigne aussi d’une certaine critique et d’une exigence forte pour le fonctionnement de la démocratie. Il y a une volonté de participer autrement, pas seulement par le vote. Les jeunes sont mobilisés lorsqu’il s’agit d’organiser des marches pour le climat, par exemple, de faire des pétitions ou des boycotts. Il n’y a pas un désinvestissement, mais une volonté de participer à la politique dans des formes profondément renouvelées."

Alors comment transformer cet intérêt des jeunes en engagement politique ? "On pourrait choisir le jour de sa majorité entre 15 et 25 ans, plutôt que d’avoir une majorité subie, avance Armel Le Coz, co-fondateur de l'association Démocratie ouverte. On pourrait aussi imaginer un parcours avec des tuteurs citoyens tirés au sort parmi des membres d’associations, qui permettraient pour chaque jeune de se poser la question de la place qu’il voudrait avoir dans la société."

Vote par correspondance, sur Internet ou par jugement majoritaire

Le système électoral dans son ensemble devrait aussi être repensé. "C’est sans doute le plus contraignant au monde, affirme Jean-Yves Dormagen. On est l’une des seules démocraties où les électeurs doivent s’inscrire, via une démarche spécifique, sur les listes électorales. Donc tout ce qui pourrait faciliter le vote serait bienvenu."

Plusieurs hypothèses sont envisageables : mettre en place le vote par correspondance, par exemple, ou bien le vote sur internet, même s’il pose plusieurs difficultés, notamment des risques de fraude. Ou alors, un peu moins connu : le vote par jugement majoritaire. "C’est un mode de scrutin qui a été inventé en France, et qui consiste à donner, pour chaque candidat, une mention allant de 'très bien' à 'à rejeter'", explique Armel Le Coz, de l’association Démocratie ouverte. Celui qui gagne, c’est celui qui a la meilleure mention majoritaire. Donc, on a un mode de scrutin plus précis qui évite les écueils du vote utile ou par défaut."

Autre solution, envisagée cette fois par Jean-Luc Mélenchon : le chef de la France insoumise propose d’instaurer un seuil minimum de participation pour valider un scrutin. C’est déjà le cas, par exemple, pour les élections départementales, où les candidats doivent obtenir plus de 50 % des suffrages exprimés, mais aussi que ces voix représentent 25 % des inscrits, pour être élus dès le premier tour.

Une réforme incontournable pour le prochain quinquennat

Reste à savoir quand réformer le système électoral. "Cela susciterait un débat important de modifier les modalités de vote pour l’élection présidentielle, alors qu’il y aura probablement une participation satisfaisante, souligne Romain Rambaud, professeur de droit public à l'université Grenoble-Alpes, et spécialiste de droit électoral. Mais ce qui est certain, c’est qu’il faudra que des réformes institutionnelles profondes et audacieuses soient proposées pendant la campagne présidentielle, pour espérer qu’elles soient mises en place dès le début du prochain mandat." En attendant, la majorité devrait lancer un groupe de travail, à l’Assemblée nationale, pour justement préparer une grande loi de modernisation des modalités de vote.

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