A cause du coronavirus, et des mesures de confinement, il n'y aura pas aujourd'hui de cérémonie publique avec la lecture des noms de ces 569 personnes, un chiffre sous-estimé, mortes loin des regards. Penser à tous ceux qui sont morts à la rue ces dernières années, c'est bien évidemment penser également à tous ceux qui vont y mourir dans les prochaines semaines, touchés par le Covid-19.
Malgré le confinement, le report de cet hommage n'était pas envisageable. "Très rapidement, la dimension symbolique a pris le dessus" explique Géraldine Franck, présidente du Collectif des Morts de La Rue. D'autant plus qu'il s'agit d'un domaine pour lequel on manque cruellement de statistiques, et que les personnes de la rue meurent de manière prématurée.
"Dans la rue, on n'a pas de maladies spécifiques. On va connaître les maladies du grand public. On va mourir de fatigue, de vieillesse, de cancer. Mais on sait que les personnes vont mourir beaucoup plus de causes externes : les accidents, les agressions et les suicides. Ce qu'on a pu constater, c'est que ces causes externes sont beaucoup plus élevées pour les personnes à la rue que celles en situation d'hébergement" ajoute-t-elle.
Le problème étant complexe, les réponses à apporter aux morts de la rue le sont également. Pour autant, on sait comment faire chuter le nombre de décès chez les personnes sans-abri. "Il faut fermer le robinet qui mène à ce que des gens se retrouvent à la rue. Il faut plus de logements à loyer modéré, plus d'hébergement, une meilleure prise en charge par l'aide sociale à l'enfance. Une fois que les personnes sont à la rue, c'est une meilleure coordination des parcours de sortie. Il y a des dispositifs intéressants, mais qui manquent de fluidité" lance Géraldine Franck.
Par ailleurs, les outils et les services proposés aux personnes de la rue se sont réduits comme peau de chagrin avec le coronavirus. De nombreux bains-douches ont fermé, de nombreux toilettes ont également fermés. Plusieurs distributions de nourriture se sont arrêtées. "Il a fallu que tout cela se réorganise et réouvre pour que les personnes de la rue puissent s'organiser" explique la présidente du Collectif Les Morts de La Rue.
En période de confinement, la question de la nourriture et de l'argent pose problème pour les sans-abris. Moins de distributions de repas. Interdiction de faire la manche. "Il a fallu se rapprocher des enseignes de distribution alimentaire pour bénéficier de la charité publique. Et comme il n'y a plus personne dans les rues, il devient difficile de faire la manche" conclut Géraldine Franck.
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