Vous avez dû entendre cette étrange info sur votre radio préférée :
« La Réforme du Livre VI du droit interne de l’Église catholique a été rendue publique ce 1er juin, au terme d’un chantier lancé en 2007 par Benoît XVI ». Dit ainsi voilà qui parait assez abscon.
Mais s’il l’on précise qu’il s’agit, en particulier, de ce qui concerne la pédocriminalité, voilà qui prend sens tout autrement et manifeste l’importance des enjeux.
Le point essentiel est la création d’un article spécifique sur les agressions sexuelles commises par des prêtres, religieux ou laïc en mission ecclésiale contre les mineurs ou les personnes en état de faiblesse.
Jusque-là, la mise en jeu de la sexualité d’un clerc avec un mineur n’y était pas considérée comme un délit en soi, mais comme une simple variante d’une infraction au sixième commandement du Décalogue – « Tu ne commettras pas d’adultère ». Variante située entre le mariage clandestin et la violation d’une obligation de résidence, dans une partie relative aux « obligations spéciales » des clercs, comme le célibat. Propos illisibles et qui avaient de quoi faire bondir victimes et quiconque est engagé ou simplement réfléchit. La confusion des registres – du péché, du réglementaire, du pénal, de la morale – était complète, ce qui participait à l’aveuglement sur la gravité du mal commis et plus encore du mal subi par des victimes, mal qui peut durer toute l’existence. Il aura donc fallu tant de drames, de crimes et le courage autant que la colère persévérante des victimes pour qu’enfin les choses soient simplement plus justes.
Le nouvel article a été inséré dans une partie qui traite des « délits contre la vie, la liberté et la dignité humaine », aux côtés du meurtre. Et nous savons combien ces méfaits relèvent du meurtre de l’âme autant que l’atteinte à l’intégrité et à la dignité.
Fait nouveau, ces peines sont élargies à la consultation ou la diffusion d’images pédopornographiques. Pour la première fois également, le code permet d’incriminer des « relations » sexuelles avec des majeurs « protégés » par la loi civile mais aussi obtenues par « violences », « menaces » ou « abus d’autorité ». Ce qui concerne au premier chef les personnes liées par des relations hiérarchiques, dans la vie religieuse ou les diocèses. Il s’agit de pouvoir punir les abus d’autorité, en particulier dans des cas d’abus spirituels, dans le cadre de relations marquées par l’emprise. De plus, sont tenus pour responsables les personnes en position d’autorité qui auraient failli dans leur mission de supervision et de sanction.
S’il ne s’agit pas là d’une révolution et l’on peut regretter que soit encore fait mention de ce même 6e commandement, si déplacé en pareils crimes. Pourtant ces transformations sont réelles et étaient un pas indispensable pour nommer les choses comme elles sont, afin de pouvoir les combattre et les poursuivre.
Véronique Margron op.
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