Pour notre chroniqueur, les derniers événements économiques laissent à croire que la mondialisation pourrait bien être derrière nous. Explications.
Le libre-échange semble avoir du plomb dans l’aile. Le dernier exemple vient des États-Unis. Joe Biden a lancé une prime de 12.500 dollars pour l'achat d'une voiture électrique, à condition qu'elle soit produite en Amérique. Si ce n'est pas le cas, la prime est amputée de 40%. Il s’agit typiquement d’une forme de protectionnisme. La multiplication de ces accrocs aux principes du libre-échange pourrait signifier à terme que la mondialisation telle qu’elle se développait est en train de prendre fin.
Il y a toujours eu et il y aura toujours des échanges internationaux. Cependant l’histoire nous montre que leur importance fluctue au cours du temps. La mondialisation que nous connaissons est la deuxième du genre. La première commence au XIXième siècle, portée par l’industrialisation, la colonisation et le système de l’étalon or, et s’arrête brutalement avec la première guerre mondiale.
Pendant l’entre-deux guerres, on passe d’un système global, à une juxtaposition de zones monétaires et commerciales : l’Angleterre avec le Common Wealth, les États-Unis avec l’Amérique du Sud, et la France avec les Colonies françaises d'Afrique, ce qui donnera naissance au franc CFA.
Il est possible que nous assistions à nouveau à un recul du périmètre des échanges internationaux, qui nous ferait passer d’une économie très mondialisée à une économie plus régionalisée. Les États-Unis se tourneraient moins vers l’Asie et davantage vers l’Amérique Latine. Pour la France au sein de l’Union Européenne, il s’agirait de renforcer nos échanges avec l’Europe de l’Est ou l’Afrique du Nord.
Oui, on peut dire que la crise environnementale est une des raisons de ce recul. Elle nous montre que ce qui se passe à l’autre bout de la planète nous concerne tous. De manière emblématique, l’accord commercial entre le Mercosur en Amérique du Sud, et l’Union Européenne, n’a pas été signé car il exposait trop l’Amazonie à la déforestation. C’est également cette cause environnementale qui a fait apparaitre de nouveaux acteurs, dans le textile par exemple, qui font le choix de produire en France, avec des matériaux locaux et durables.
Mais ces acteurs s’ajoutent à l’existant et ne le remplace pas. Les grandes chaines ne relocalisent pas en France, et d’ailleurs ça ne changerait pas la donne environnementale si c’est pour continuer à produire de la mode rapide et du quasi-jetable. Donc concrètement on va vers la cohabitation de deux modèles, global et local, l’un ne remplaçant pas l’autre.
Elle a mis en évidence des fragilités et des dépendances dans les circuits d’approvisionnement. Les pénuries, encore en cours dans certains secteurs, poussent à se réorganiser différemment. Cependant, en termes de résilience, tout produire en France n’aurait pas de sens. Mieux vaut avoir plusieurs lieux de production, soumis à des risques différents, que d’avoir tous ses œufs dans le même panier…
C’est là où les pays d'Europe centrale et orientale ont une carte à jouer. Ils allient savoir-faires industriels, proximité géographique et compétitivité, des atouts majeurs alors que la Chine cesse d’être simplement l’usine du monde. Tous ces signes ne sont que les prémisses d’un monde multipolaire dans lequel les super-puissances perdraient un peu leur influence globale mais renforceraient leur emprise régionale.
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