Lundi 18 mars, l'agglomération du choletais a voté un plan d'aides pour tenter de juguler le manque de médecins sur son territoire. Six-cent-mille euros sur trois ans. Mais l'incitation ne doit pas être simplement financière juge l'Amoc, l'Association médicale des omnipraticiens du choletais.
Laurent Hitrope est le vice-président de l’Amoc, l’Association médicale des omnipraticiens du choletais. Pour ce médecin à la retraite, l’aide annoncée par l’agglomération va dans le bon sens mais ne sera pas suffisante sans grande politique nationale en faveur de la médecine.
Si on fait un bref rappel de la situation, rien que dans le choletais, ce sont 12 000 personnes, sont actuellement sans médecins traitants ?
Laurent Hitrope : « Ils sont même 13 500 ! Et ça ne va pas s’arranger puisque cinq médecins vont partir dans l’année. Donc ce nombre pourrait bientôt grimper à près de 20 000 personnes sans médecin sur une population de 100 000 habitants dans l’agglomération ! »
Le choletais est pourtant dynamique en termes d’emploi, pas excessif concernant l’immobilier. Comment est-ce qu’on en arrive là ?
« C’est une problématique que l’on retrouve dans la plupart des grandes et moyennes agglomérations, ce n’est pas un problème spécifique au choletais. Et c’est aussi le cas en ruralité. Il faut savoir que 87% de la France est considérée comme désert médical ! Comment peut-on expliquer ça ? D’abord, le peu d’étudiants qui sortent d’études de médecines restent sur les zones universitaires à la fin de leur formation. C’est la première raison.
Deuxième réflexion : aujourd’hui les médecins sont en couple, évidemment, mais le conjoint aussi travaille ! Donc il devient nécessaire de faciliter les choses de ce côté-là également. La sociologie des praticiens a changé, ce ne sont plus les mêmes profils qu’il y a 40 ou 50 ans. »
L’Agglomération de Cholet vient de débloquer 600 000 euros d’aides sur trois ans et avec trois aides financières proposées. Qu’en pensez-vous ?
« Ça va dans le bon sens, mais ce serait très insuffisant si ce n’était qu’une aide financière. Il faut parler des conditions d’exercice. Les jeunes médecins souhaitent une activité près des structures hospitalières et une organisation en multi professionnalité pour améliorer la prise en charge du patient. C’est le projet de santé qui prime. Evidemment, l’aide financière pèse dans la balance et peut être le déclencheur de tout ça. »
Tout n’est pas qu’une question d’argent ?
« Non ! Ce qui prime et qui est prioritaire aujourd’hui, ce sont les conditions de travail en commun avec les infirmiers, sage-femme, … »
Si les médecins ne sont plus les mêmes qu’il y a 40 ans, ça veut dire qu’il faut repenser tout notre système de santé ? En tout cas, son fonctionnement ?
« C’est déjà quelque chose qu’on a commencé à revoir il y a une vingtaine d'années. Mais la prise en charge des pathologies est de plus en plus complexe. La population est vieillissante. Et puis il y a la question des formations, des implantations, ça a bien changé... »
Il n’y a pas de solution miracle ? En tout cas de solutions avec effets visibles immédiatement ?
« Non, ce sont des solutions à long terme. Rendez-vous compte, il faut déjà dix ans d’étude pour devenir médecin ! Aujourd’hui, on est dans le remodelage complet du système de santé français. Désormais, il faut penser les choses en termes de prise en charge populationnelle et non plus strictement par le prisme des individus ! C’est un raisonnement global qu’il faut inventer collectivement, et pas sur le seul désir d’une installation d’un médecin dans un coin ! C’est un problème de santé publique. »
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