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RCF Dossier de marcredi 09 decembre
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Dossier de marcredi 09 decembre

Un article rédigé par Clara Gabillet - RCF,  -  Modifié le 9 décembre 2020
La police des polices est dans le viseur de plusieurs personnalités politiques qui la jugent trop laxiste. Certains souhaitent remplacer cette institution par une autorité indépendante.
DR DR

La police est dans la tourmente ces dernières semaines après plusieurs affaires de violences commises par des policiers. L'inspection générale de la police nationale (IGPN) est aujourd'hui largement remise en cause. Jugée peu efficace, et trop dépendante du ministère de l’Intérieur, certains veulent la réformer. 

On appelle communément l'IGPN "la police des polices". Elle dépend du ministère de l’Intérieur. Ses 285 agents, en majorité policiers, ont pour objectif d’enquêter sur des affaires qui concernent les effectifs de police pour des délits de droit commun ou des violences policières par exemple. Mais l'IGPN ne sanctionne pas. Le procureur de la République peut aussi saisir l'IGPN pour mener une enquête. En 2019, il y a eu plus de 9500 signalements faits à l'IGPN. L'institution a été saisie de 1460 enquêtes judiciaires. 

Deux policiers ont été placés en détention provisoire il y a deux jours. Ils sont accusés d'avoir tabassé un producteur de musique, Michel Zecler il y a 10 jours. Cette décision c’est du jamais vu. Il est assez rare de voir des enquêtes pour violences aboutir. Des situations que constate régulièrement maître Arié Alimi, avocat au barreau de Paris qui a défendu notamment la famille de Cédric Chouviat, un homme mort le 5 janvier dernier après un contrôle de police. Selon l'avocat, les enquêtes sont "soit pas du tout faites, soit baclées c'est-à-dire qu'il n'y a pratiquement aucun acte d'enquête qui est réalisé, les victimes pas interrogées, les vidéos pas recherchées. On a le sentiment que l'IGPN protège les fonctionnaires de police lorsqu'ils agissent dans l'exercice de leur fonction et qu'ils ont commis des abus à l'égard des personnes contrôlées".

Pour une autorité indépendante

De nombreuses voix s’élèvent pour demander une réforme de l'IGPN. Le groupe de parlementaires Territoire de progrès, l'aile gauche de la majorité l'a proposé. "C'est toujours un peu problématique de s'auto-contrôler au sein d'une même corporation. L'idée ça pourrait être de composer une autorité indépendante de citoyens, de magistrats, d'élus", explique Xavier Iacovelli, sénateur des Hauts-de-Seine et secrétaire général de Territoires de progrès. 

Les critiques faites à l’IGPN sont souvent liées à son rattachement au ministère de l’Intérieur. Si elle devenait indépendante, elle pourrait gagner en légitimité selon Mathieu Zagrodzki, chercheur spécialisé sur la police. "Le seul fait que cette inspection soit perçue aux mains du pouvoir la délégitime. Que ce soit fondé ou pas, c'est un problème. L'efficacité d'une instituion repose sur sa légitimité et sur la propension de la population à coopérer avec elle", assure le chercheur, selon qui l'IGPN pourrait aussi dépendre de la défenseure des droits Claire Hédon, une autorité administrative indépendante.

Le modèle anglais

En Angleterre, la police est contrôlée par l’Independent Office for Police Conduct. Comme son nom l'indique, l'institution est indépendante. Et un quart seulement de ses effectifs sont des policiers. Elle fait figure d’exemple par sa transparence, un facteur qui peut redonner confiance dans l’institution.

Toutefois, un meilleur contrôle pourrait-il faire diminier les violences policières ? Difficile à dire a priori mais selon les partisans de la réforme de l’IGPN, une structure indépendante permettrait de mettre fin à une forme d’impunité des policiers. "Il faudrait qu'il n'y ait plus de laxisme et l'impunité organisée depuis plusieurs décénnies dans ce pays aboutit à un laisser-faire. Le ministère de l'Intérieur et la justice couvrent les fonctionnaires et évidemment lorsqu'on se sent couvert, on commet des actes irréparables", affirme maître Arié Alimi. 

Une mesure mal perçue par les policiers 

Chez les policiers, cette réforme provoque une forte incompréhension. "L'IGPN fonctionne bien. Quand vous y allez, c'est pas une partie de plaisir, c'est un rouleau compresseur. C'est encore pire des flics qui jugent d'autres flics car ils connaissent la réalité du terrain. On propose encore une réponse politique et en rien pragmatique", regrette Fabien Vanhemelryck, secrétaire général du syndicat de police Alliance.

L'IGPN, elle, réfute le terme de violences policières et l'idée qu'elle puisse blanchir les policiers. L’exécutif n’est lui pas spécialement favorable à une réforme mais n’en écarte pas la possibilité. Et pour la première fois, avant-hier, en commission des lois, le ministre de l'intérieur Gérald Darmanin a admis qu’il y avait un problème structurel au sein de la police. La formation des policiers est mise en cause. En France, la formation initiale pour un gardien de la paix dure 8 mois.

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Le dossier de la rédaction © RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
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