Il n'a jamais autant fait débat. Créé en 2014 et mis en place en 2017, le Nutri-score a vu son mode de calcul récemment révisé, mais le nouvel algorithme déplait aux industriels de l'agro-alimentaire.
Mis en place en 2017, le Nutri-score attribue une couleur et une note de A à E basée sur le nombre de calories d’un aliment, sa teneur en sucre, en graisses, et en sel. L'objectif : informer le consommateur des qualités nutritionnelles des produits proposés par la grande distribution.
Récemment, son mode de calcul a été revu. "Cette mise à jour était prévue pour suivre les évolutions du marché alimentaire et corriger certaines imperfections du Nutri-score", abonde le Pr Serge Hercberg, épidémiologiste et nutritionniste, fondateur du Nutri-score.
Ainsi, la nouvelle version pénalise davantage les produits sucrés, salés ou avec beaucoup d'acide gras saturé, ainsi que les boissons édulcorées et la viande rouge ; en revanche il classe mieux l'huile d'olive et de colza et favorise les aliments riches en fibres.
"Ce sont des améliorations qui permettent d'avoir un outil encore plus efficace", poursuit le scientifique.
Mais le nouvel algorithme n'est pas du goût de tous, un certain nombre d'industriels ayant vu leurs produits déclassés. Alors qu'il faisait partie des premiers à avoir apposé sur le Nutri-score sur ses emballages, Danone a notamment choisi de faire marche arrière. En cause : ses yaourts à boire désormais considérés comme des boissons sucrées, et non plus comme des aliments, et ainsi comparés aux autres produits de cette catégorie.
"Le nouvel algorithme du Nutri-score aurait du entrer en vigueur en France en janvier 2024. Mais les lobbies bloquent sa mise en application car cette nouvelle version ne leur plait pas", s'insurge Audrey Morice, chargée de campagne pour l'ONG Foodwatch France.
"C'est inadmissible. Il faut arrêter de faire passer les profits de l'industrie agro-alimentaire devant la santé des consommateurs".
Pourtant, Serge Hercberg rappelle que cette modification a bien été établie par un comité scientifique indépendant de sept pays.
L'efficacité du Nutri-score en tant qu'outil de santé publique ne serait plus à démontrer.
"Il est aujourd'hui démontré scientifiquement que le fait de manger des aliments mieux classés réduit le risque de maladies chroniques liées à la nutrition comme l'obésité mais aussi certains cancers, le diabète et les maladies cardio-vasculaires", affirme l'épidémiologiste Serge Hercberg.
Une nouvelle étude scientifique, réalisée par l'équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle CRESS EREN et publiée le 11 septembre dernier confirme le lien entre la consommation d'aliments moins bien classés au Nutri-Score et un risque plus élevé des maladies cardiovasculaires.
Dans ce contexte, l’une des solutions serait donc de rendre le Nutri-score obligatoire pour les industriels. C’est d’ailleurs ce que demande un collectif de 1142 scientifiques et professionnels de santé, qui ont adressé une lettre ouverte au Premier Ministre.
"Aujourd'hui 1 400 entreprises ont adopté le Nutri-score sur une base volontaire, soit environ 60 % du marché alimentaire français. C'est déjà très bien, mais on voit bien que certaines grandes marques le combattent depuis toujours, et que de nouvelles firmes se retirent. Pour permettre aux consommateurs de faire leurs choix de façon éclairer, il faut donc le rendre obligatoire", conclut Serge Hercberg.
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