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En mémoire de Marceline

RCF,  - Modifié le 20 février 2019
Retrouvez chaque mardi l'édito de Véronique Margron.
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Il y a quelque temps, je relisais l’hommage prononcé par la rabbin Delphine Horvilleur, lors des funérailles de Marceline Loridan-Ivens à Paris, le 21 septembre 2018, jour de Yom Kippour.

Marceline, matricule 78750, déportée le 13 avril 1944, par le convoi 71 à destination d’Auschwitz-Birkenau, le même convoi qui emportait Simone Veil. Elle voulait qu’il ne s’efface pas, qu’il soit écrit sur sa tombe, que nul jamais ne puisse lui prendre aussi ça. Ce numéro qui doit rester pour qu’il soit, comme elle l’avait confié à Delphine Horvilleur : "une victoire, parce que je suis revenue, je suis vivante".
 
Et voici ce que raconte Delphine Horvilleur : 

"Alors Yom Kippour, comme date, forcément, « ça a de la gueule ». Je n’en connais pas de meilleure. C’est le jour où, selon la tradition, s’ouvrent les portes du Ciel, un jour où, dit-on, se réunit un tribunal qui décide du pardon. Dieu juge les hommes…
À moins que… à moins que ce ne soit l’inverse.
Une célèbre blague juive le raconte ainsi :
Un jour à Yom Kippour, le rabbin se rend compte que, dans le fond de la synagogue, un homme, Yisthok, semble parler seul, s’agiter et se disputer avec quelqu’un.
Le rabbin s’approche de lui et lui demande : « Yitshok, à qui parlais-tu ? »
Et l’homme répond : « Je parlais à Dieu. Je lui disais : « Je veux bien demander pardon pour ce que j’ai fait mais, franchement, je n’ai rien fait de si terrible. Par contre, toi, Dieu, regarde ce monde, la souffrance, la douleur, les catastrophes qui s’abattent sur nous. Toi Dieu, c’est à toi de nous demander pardon ! » »
Alors le rabbin demande : « Mais comment s’est finie la conversation ? »
Et Yitshok dit : « C’est simple, j’ai dit à Dieu : « Je te pardonne, tu me pardonnes, et on est quittes ! » »
Et c’est alors que le rabbin s’emporte contre Yitshok et lui dit : « Mais enfin, pourquoi as-tu laissé Dieu s’en tirer à si bon compte ? »
La tradition juive entend la rébellion et la colère, même tournée contre Dieu. Elle l’écoute et lui fait de la place. Et si l’homme peut demander à Dieu des comptes, alors je crois qu’en cet instant, face à Marceline, Dieu est en situation difficile et pourrait bien passer un sale quart d’heure.
Parce que devant lui se tient une avocate féroce de l’humanité qui va plaider, comme personne, pour sa génération."

Alors soyons nous aussi, bien modestement de ce même peuple qui va plaider pour ce temps.

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