Depuis la tempête Ciaran, les maires du littoral manchois ont remis plus que jamais la question du recul du trait de côte et de l’érosion sur la table. Pour eux, plus aucun doute qu’il faut un plan longue durée, mais il ne faut pas en oublier le présent. Ils souhaitent protéger la ligne de côte actuelle et plus d'indépendance
Vendredi 8 décembre dernier, ils étaient une quarantaine de municipalités du littoral normand représentées à la réunion régionale de l’ANEL (l’association nationale des élus des littoraux) à Saint-Vaast-la-Hougue dans la Manche. Trois thèmes ont été abordés durant la rencontre : l’éolien, le logement et le recul du trait de côte. Des trois, c’est ce dernier qui a concentré le plus de temps de parole et d’échange. La tempête Ciaran a laissé les stigmates de son passage. « On a eu de la chance que les coefficients ne soient que de 70 durant la tempête », lance au milieu du brouhaha un élu. « Je vous garantis qu’il y aura des morts », prévient un des représentants de l’association de défense du trait de côte Ouest Cotentin quand l’assemblée évoque le frein de l’État à mener des travaux à court terme de protection du littoral. Tous les élus présents s’accordent sur un point : il faut protéger les biens et les personnes en attendant de trouver des solutions à long terme au recul du trait de côte.
Une solution à court terme, c’est ce qui s’est achevé le 1er décembre à Hauteville-sur-Mer. L’association syndicale autorisée (ASA) « Vivre avec la mer » demandait un rechargement en sable de 10 000 m3 devant la digue depuis des années. Une autorisation pour travaux d’urgence qu’ils ont obtenue seulement après le passage successif des tempêtes Patricia en août et Ciaran en novembre. « On s’est aperçu qu’on avait perdu beaucoup de sable au pied de la digue et le risque si le niveau de sable est trop bas, c’est de créer une brèche mettant en danger les biens et les personnes », nous explique Adeline Hubert, responsable de la Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) pour Coutances mer et bocage. Pour Louis Teyssier, conseiller délégué chargé du littoral pour l’agglomération, il faut protéger les biens et les personnes le temps de les relocaliser. C’est selon lui la teneur du Projet Partenarial d’Aménagement (PPA) qu’il mène aux côtés de l'État. Un des trois PPA pionniers en France dont la phase d’action ne commencera que l’année prochaine. Le projet de relocalisation manque cependant encore à l’appel.
Yannick Moreau, le président de l’ANEL et maire des Sables-d'Olonne, a dirigé les débats à Saint-Vaast-la-Hougue. Pour lui, le problème, c’est la loi climat et résilience, faite pour lutter contre l’érosion, mais pas contre la submersion et les aléas climatiques. Les maires manqueraient de cadres adaptés à leurs communes. « Le rêve des élus des littoraux : laisser les maires prendre leurs responsabilités, oser faire confiance aux élus pour trouver un chemin raisonnable entre l’adaptation du littoral, la protection de la population et l’acceptation du fait que la mer va monter et qu’il faut composer avec ». Un point de vue que ne partage pas l’association Manche Nature. Pour Alain Millien, l’administrateur de l’association écologiste, les maires ont « des intérêts économiques contradictoires » et « construisent encore des bâtiments en zone submersible ». Quant à l’urgence, que certains élus mettent en exergue, pour Manche nature ce n’est qu’une excuse qui empêche de prendre dès aujourd’hui des décisions en matière de relocalisation.
Mais de quelle urgence s’agit-il alors que chacun constate depuis nombre d’années le retrait du trait de côte, l’érosion du cordon dunaire… et les nouvelles constructions sur une zone considérée comme submersible. (Communiqué Manche Nature du 28/11/2023)
Les élus attendent aussi des financements pour lutter contre le recul du trait de côte. La loi de finance 2024 est censée en proposer pour une mise en application prévue en 2025.
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