Retour sur le vote du CESE, la semaine dernière, au sujet de la légalisation de l'euthanasie.
Un vote qui a beaucoup fait parler de lui. La semaine dernière, le CESE s'est autosaisi après avoir reçu des pétitions rassemblant plus de 200 000 signatures, demandant la légalisation d'une aide active à mourir. Un sujet qui est précisément l'un des plus débattus, à l'occasion des Etats Généraux de la Bioéthique, ouverts au mois de janvier. Un projet d'avis intitulé "Fin de vie : la France à l'heure des choix", a été soumis en séance plénière mardi dernier. Les débats ont été ouverts par le président du CESE, Patrick Bernasconi, qui a expliqué pourquoi le conseil s'est saisi de cette question.
A l'issue du vote, le CESE s'est donc prononcé explicitement en faveur de la légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté : 107 voix pour, 18 contre, 44 abstentions. Le CESE préconise donc la légalisation de l'euthanasie et du suicide assisté. Et la position des mouvements chrétiens a suscité une certaine incompréhension.
Concrètement, le texte du CESE rejoint le constat de l'existence d'un "mal-mourir" en France et il appelle à un accroissement et à une meilleure répartition de l'offre de soins palliatifs dans le pays. Onze "préconisations" sur quatorze y sont consacrées. Mais, la proposition qui a fait véritablement débat parmi les 30 membres de la commission temporaire sur la fin de vie, c'est celle qui reconnaît pour un patient la possibilité d'une "sédation profonde explicitement létale". C'est ce qu'explique Pierre-Antoine Gailly, rapporteur de la commission temporaire sur la fin de vie.
Cet avis explique que plusieurs facteurs pourraient justifier l'usage relativement réduit de la sédation profonde et continue dans notre pays. Il cite notamment "les cas judiciarisés et médiatisés" régulièrement, preuves, dit-il, des limites de la loi pour soulager des douleurs "incontrôlables", malgré les moyens mis en œuvre.
On pense évidemment au cas de Vincent Lambert, hospitalisé "en état de conscience minimale" depuis 2008 et dont le sort déchire sa famille. Pour Marie-Dominique Trébuchet, vice présidente de la Société Française d'Accompagnement et de Soins Palliatifs, il faut faire attention à ne pas utiliser ces cas médiatiques pour décider de changer la loi.
Après la prière mariale du Regina Caeli dimanche dernier, le pape François a prolongé sa réflexion sur la “prospective chrétienne du corps“. Il a cité les cas du Français Vincent Lambert et de l'Anglais Alfie Evans pour exprimer la difficulté de certaines situations de patients. A ce titre, il a aussi demandé que "chaque malade soit respecté dans sa dignité et soigné d'une façon adaptée à son état de santé".
Ce qui a soulevé beaucoup d'interrogations. Les mouvements chrétiens siégeant au CESE ont eu des attitudes diverses lors de ce vote. Les trois mouvements de jeunesse chrétiens représentés dans cette assemblée, à savoir les Scouts et Guides de France, la Jeunesse ouvrière chrétienne et le Mouvement rural de la jeunesse chrétienne n'ont pas pris part au vote.
Ils ont estimé qu'ils n'étaient pas compétents sur un tel sujet "sociétal". Il ne s'agit pas d'une abstention, au niveau juridique du terme, puisqu'ils ne se sont pas rendus aux urnes et ne sont donc pas comptabilisés dans le nombre d'abstentionnistes. Ensuite, les quatre représentants du syndicat chrétien CFTC ont voté en ordre dispersé : deux pour, deux contre. Joseph Thouvenel est vice-président de la CFTC et membre de la commission sur la fin de vie. S'il partage les propositions du CESE sur le renforcement des soins palliatifs, il regrette qu'on ait mêlé dans le même avis deux problématiques distinctes.
Enfin, et c'est sans doute le vote qui a le plus fait débat, les Associations familiales catholiques ont voté en faveur du texte. Des choix qui peuvent surprendre dans la mesure où l'Eglise de France a encore rappelé avec fermeté son opposition à l'euthanasie dans son discours à Emmanuel Macron au Collège des Bernardins.
En fait, Antoine Renard a proposé des amendements pour que les termes "soins" et "médication" ne soient pas associés à l'euthanasie. Ce qui permettait d'inscrire un "dissensus" pour montrer que l'avis en faveur de la légalisation de l'euthanasie n'était pas aussi tranché que cela. Les explications de Marie-Pierre Gariel, également adhérente des AFC, qui siège au CESE au titre de l'Union nationale des associations familiales.
Mais par la suite, Marie-Pierre Gariel dénonce également une "communication déloyale du CESE", qui n'a pas fait mention du dissensus dans son communiqué suite au vote, ni en conférence de presse. De fait, le texte a été reçu, notamment par la presse, comme explicitement favorable à l'euthanasie et au suicide assisté, sans nuance spécifique.
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