Au moment où l’Europe enregistre plus d’un million de morts du Covid-19, la France, elle, vient de dépasser les 100.000 morts, en très grande majorité des personnes âgées, plus fragiles. Le rythme de la vaccination n’autorise pas à relâcher les efforts, à un moment où des questions se posent quant aux vaccins d’AstraZeneca et Jansen et au variant brésilien. État des lieux.
Cette nouvelle lignée du coronavirus ne représente que 0,5 % des contaminations en France métropolitaine. C’est le variant britannique qui est majoritaire sur notre territoire. Pourtant, les autorités ont décidé cette semaine de suspendre les liaisons aériennes avec le Brésil. Pour Yannick Simonin, virologue, maître de conférences à l’université de Montpellier, c’est en fait l’arrivée de nouveaux variants, issus de cette souche qui pourrait poser problème : "Quand un virus circule beaucoup sur un territoire donné, comme c’est le cas actuellement au Brésil, il pourrait à nouveau muter et devenir encore plus contagieux, et donc potentiellement plus dangereux".
Autre difficulté : ce variant brésilien pourrait, selon certaines études, entraîner plus de réinfections. L’une des craintes des autorités sanitaires concerne l’efficacité des vaccins sur cette souche. Car le variant brésilien, tout comme le sud-africain, résiste un peu plus aux vaccins. Une étude publiée en mars a montré une perte de protection des anticorps de convalescents ou de personnes vaccinées face à ces variants. Alors si, selon les médecins, la vaccination reste malgré tout efficace, il faudra peut-être revoir les vaccins aujourd’hui mis sur le marché, avec l’arrivée de nouveaux variants, peut-être plus dangereux.
Yves Gaudin, virologue à l’institut de biologie intégrative de la cellule à Paris-Saclay, ne voit pas comment on pourrait échapper à une deuxième campagne de vaccination : "Je pense qu’on aura des variants qui reviendront à un moment ou à un autre. Est-ce que ce sera le variant brésilien ou d’autres variants ? Donc il faut probablement s’attendre, peut-être à l’automne prochain ou dans un ou deux ans, à revacciner avec un vaccin un peu différent." Et au vu de l’apparition de ces variants contagieux, selon Yves Gaudin, l’immunité collective pourra être atteinte quand environ 75 à 80% de la population sera vaccinée.
Ces vaccins sont actuellement suspectés d'avoir provoqué plusieurs dizaines de cas de très rares caillots sanguins, dont certains ont été mortels. Le laboratoire Jansen qui produit le vaccin de Johnson and Johnson a annoncé qu'il allait retarder le déploiement de son vaccin en Europe, l’agence européenne du médicament devrait rendre un avis dans les prochains jours.
Le vaccin d’AstraZeneca est quant à lui désormais réservé aux plus de 55 ans. La Haute autorité de santé a également recommandé pour les moins de 55 ans qui avaient déjà reçu une première injection de compléter avec une deuxième dose d’un vaccin ARN messager, c'est-à-dire du Pfizer ou du Moderna. Ce qui n’est pas sans susciter d'inquiétude auprès du grand public. Elisabeth Bouvet, présidente de la commission technique des vaccinations de la HAS, se veut rassurante : "La seule chose qu’il va falloir vérifier, c’est si on a une bonne réponse immunitaire. Ce qui est vraisemblable, mais on le saura très rapidement".
Ces inquiétudes autour de ces vaccins peuvent freiner le calendrier de la vaccination de la France, mais il faut toutefois relativiser, car AstraZeneca livre au final moins de doses que prévu. Quant au laboratoire Jansen, il comptait livrer 200.000 doses mi-avril et 300.000 doses à la fin avril, alors que Pfizer représente 2 millions de doses par semaine.
Et pourtant c’est le rôle de la pharmacovigilance : recueillir des informations utiles à la surveillance des médicaments, y compris des informations sur les effets indésirables présumés, en cas d’utilisation d’un médicament. Pour Annie-Pierre Jonville-Béra, présidente du Réseau français des centres régionaux de pharmacovigilance, rien que de très normal. La détection des rares cas de thromboses chez AstraZeneca a montré que le système fonctionne. Même si cela provoque de l’inquiétude auprès du grand public.
Tous les médecins appellent à relativiser sur la question des risques liés aux vaccins. Il faut dire que c’est la première crise sanitaire du XXème et XXIème siècle qui a été autant médiatisée : la moindre information est communiquée au grand public aussitôt. Ce qui peut parfois susciter de l’angoisse chez les Français. C’est une crise inédite, selon Elisabeth Bouvet de la HAS : "Tout le monde est au courant, à peu près au jour le jour, de ce qui arrive. La transparence fait que l’information arrive au jour le jour. Il y a des informations qui ne sont pas confirmées, mais qui sont finalement infirmées mais qui ont pu générer de l’inquiétude. Mais je pense que c’est le revers de la transparence."
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