L’ Assemblée Nationale a donné vendredi dernier son feu vert au gouvernement pour qu'il réforme la justice des mineurs, par ordonnance. L’opposition est vent debout. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, envisage de créer un Code de justice pénale des mineurs en retouchant l’ordonnance de 1945.
La Garde des Sceaux a fait grincer des dents mercredi dernier dans l'hémicycle en annonçant sa volonté de recourir à l’article 38 de la Constitution pour y parvenir. Cette disposition permet au gouvernement de demander au Parlement l’autorisation de prendre par ordonnances des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. La ministre de la Justice entend donc réformer l’ordonnance de 1945, en passant par le projet de réforme judiciaire en cours d’examen.
Cette déclaration de Nicole Belloubet a suscité une levée de boucliers de l’opposition. Les députés dénoncent notamment un "dessaisissement" de la représentation nationale. C'est du moins l'avis de Philippe Gosselin, député les Républicains de la Manche. En résumé, une opposition qui proteste, et une ministre de la Justice qui tente de calmer le jeu.
Nicole Belloubet l’assure : "les principes essentiels de la justice des mineurs" ne seront pas remis en cause. "Pas question de modifier l’âge de la majorité pénale", "pas question de toucher à la double vocation du juge des enfants" à la fois juge des mineurs en danger et juge des mineurs délinquants. Quant aux mesures éducatives, elles doivent prévaloir.
En revanche, la Garde des Sceaux estime que "la justice pénale doit être plus efficace et plus rapide pour éviter la lenteur et parfois l’absence de réponses pénales". Laurent Gebler est juge pour enfants. Il est aussi le président de l’Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille. Si cette réforme est nécessaire selon lui, la rapidité ne règlera pas tout. Elle sera inefficace si elle ne s’accompagne pas de moyens supplémentaires.
S'il y a un certain consensus à remettre de l’ordre dans un texte modifié, amendé à de multiples reprises, et devenu pour certains illisibles, c’est l’esprit du texte qui est plus sensible. L'ordonnance de 1945, qui traite aussi de l'enfance en danger, a déjà connu une quarantaine de réformes.
Elle est devenue au fil du temps un millefeuille difficilement lisible, et plusieurs ministres dont Christiane Taubira et Jean-Jacques Urvoas, sous la présidence de François Hollande, s'étaient engagés à la réformer sans y parvenir. Car le véritable défi est d’arriver à trouver le juste équilibre entre mesures éducatives et sanctions.
Laurent Gebler, président de l’Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille, espère d'ailleurs bien que les professionnels seront consultés dans le cadre de cette réforme. Parmi les éducateurs connus et reconnus dans ce domaine, il y a le père Jean-Marie Petitclerc, prêtre salésien, éducateur, fondateur de l’association Le Valdocco. Ce dernier est favorable à cette réforme et une justice pénale plus rapide. Mais pour lui il faut distinguer deux types de délinquance.
Précisons enfin que cette volonté de réformer l’ordonnance de 1945 via le projet de réforme de la justice intervient alors qu’une mission parlementaire de l’Assemblée sur la justice des mineurs est en cours et doit rendre ses conclusions le 6 décembre prochain.
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