Depuis le mois de Janvier, L'Organisation internationale pour les migrations (OIM) recense plus de 100 000 migrants ayant traversé la Méditerranée. Parmi eux, environ 85 000 sont arrivés en Italie et 2 300 ont péri ou disparu en mer.
L’Italie semble esseulée dans sa gestion des arrivées. Et de nouveaux protagonistes s’invitent aux côtés des bateaux des gardes côtes et des ONG, en l’occurrence ce bateau du groupe d’extrême droite Génération Identitaire qui cherche à empêcher les sauvetages de migrants en mer.
Rome accuse les ONG de créer un appel d’air, et se sent obligée de « taper du poing sur la table », selon François Gemenne. Par exemple, Médecins sans frontières est dans le viseur de la justice Italienne car l’association est accusée de faciliter l’immigration illégale. Un navire Allemand a même été mis sous séquestre. Une réaction qui en rappelle d’autres : l’Allemagne, isolée face à l'afflux de migrants avait fermé ses frontières, et l’Italie avait déjà suspendu ses opérations de sauvetage en 2014.
L’Italie a passé un accord avec la Libye pour naviguer dans ses eaux. Une situation compliquée à tenir tant le pays est divisé depuis la chute de Kadhafi. Pour François Gemenne c’est une « prison à ciel ouvert pour les migrants ». Ceux-ci préfèrent risquer leur vie en mer plutôt que de courir trop de risques en Lybie.
Un nouvel acteur a fait son entrée en Méditerranée : le C-Star, bateau des Identitaires. François Gemenne qualifie les militants du groupe d’extrême droite de « pieds nickelés criminels », qui agissent dans une totale impunité alors que les gouvernements mettent la pression sur les ONG, « comme si les médecins étaient responsables de la maladie. »
Si ce bateau est avant tout une « opération de communication », il s’agit tout de même d’une « milice privée » qui signe l’échec de Frontex, l’agence européenne pour la surveillance des frontières extérieures.
Pour le chercheur belge, il n’y a « aucune volonté politique d’avoir une réponse commune » depuis le début de la crise migratoire. Il n’y a pas de réelle coopération sur ce sujet depuis que la commission européenne a essayé d’imposer de force une politique de relocalisation des migrants qui auraient dû être « naturelle ».
Le plan d'action adopté par la commission européenne début juillet qui vise à allouer 46 millions d'euros aux gardes-côtes libyens et 35 millions d'euros pour l'Italie permet de masquer se manque de volonté politique, selon François Gemenne.
Mais sans un plan de coopération pour l’asile qui fait « défaut depuis 25 ans », il n’y aura pas de solution à la crise. Pour le chercheur de l’Université de Liège, la seule fuite en avant aujourd’hui est celle de la fermeture des frontières, qui provoque des tragédies.
Les migrations sont le fruit des facteurs politiques, économiques et écologiques qui sont le résultat de parcours migratoires qui peuvent durer plusieurs mois. François Gemenne explique que cette complexité « empêche de catégoriser les migrants ». Il ajoute que cette catégorisation pose également un problème éthique.
Ce sont aujourd’hui les passeurs qui décident « qui arrive, à quel endroit et via quelle route » et qui font donc la politique qui devrait être menée par l’Union Européenne. Ils opèrent aujourd'hui principalement en Libye, depuis la fermeture de la route des Balkans par la Turquie.
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