Un jeune de 16 ans s’est donné la mort dans sa cellule dimanche 18 août à Porcheville dans les Yvelines. Fin juin, un autre détenu de 17 ans s’était également suicidé à Orvault, près de Nantes. Deux drames qui mettent en lumière la vulnérabilité des mineurs et leur difficulté à se confronter à l’univers carcéral. Dominique Simonnot, contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, alerte sur la surpopulation carcérale et les conséquences sur les jeunes.
D'emblée, le constat est triste et sans appel : les prisons françaises sont en général plutôt remplies de jeunes gens, "avec des taux de suicides qui augmentent de manière affolante en prison, 127 en 2022 et 150 en 2023", précise Dominique Simonnot, journaliste française, spécialiste des affaires judiciaires.
Dans le cas de l’adolescent de 16 ans qui a mis fin à ses jours, la prison de Porcheville, dans les Yvelines, ne semblait pas être un établissement problématique, mais peut-être n’a-t-on pas su détecter avant qu’il allait mal. Difficile en tous les cas, selon Dominique Simonnot, de comprendre ce qui a pu motiver son geste.
En France, la surpopulation carcérale n’est pas nouvelle, le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti avait annoncé en 2018 la création de 15 000 places supplémentaires d’ici à 2027, mais pour l’instant le compte n’ y est pas. "Nous en sommes à 4 000 et nous n'atteindrons jamais les 15 000. C'est un plan promis par tous les gouvernements successifs" ajoute Dominique Simonnot. D’après les derniers chiffres du ministère de la Justice, la France recensait 78 509 personnes détenues au 1er juillet dernier, contre 77 880 en juin. Soit le plus haut niveau jamais atteint dans le pays.
Une situation d’autant plus grave pour les mineurs car “rien de ce qui devrait être mis en place ne l’est”. “L'été sont les moments de tous les dangers dans les prisons malheureusement, car il y a moins de personnel que d’habitude, et il fait très chaud depuis plusieurs années avec le dérèglement climatique. Alors ils font ce qu'ils peuvent en mettant des linges mouillés étendus aux fenêtres”, se désole la journaliste. Mais le sentiment d’étouffement demeure.
Alors pourquoi en arrive-t-on à ce stade ? Pourquoi ne pas avoir pris les choses en main en amont ? Dominique Simonnot témoigne d’un sentiment d’abandon de tous les détenus, enfermés dans une structure de la République, mais qui n'en respecte pas les lois. Par ailleurs, la moitié des mineurs détenus viennent de la rue ou de l’aide sociale à l’enfance. “C’est étrange que dans notre pays, on ne se dise pas que ces enfants sont tous les nôtres" regrette la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté. Autre problème ; le manque d'instruction apporté à ces jeunes, qui errent sans but, notamment pendant les vacances scolaires. "Ils n'ont pas suffisamment d'heures de cours qui leur donne le goût d'apprendre un métier" déplore-t-elle.
Avec de tels chiffres et des prisons surchargées, la France figure parmi les plus mauvais élèves de l'Union européenne. Pour Dominique Simonnot, il faudrait s’inspirer des pays tels que l’Espagne ou l’Allemagne qui laissent sortir les détenus deux mois avant la fin de leur peine et les encadrent pendant cette période, ce qui réduit considérablement les récidives.
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