Jean-Guilhem Xerri avoue porter en lui plusieurs inquiétudes. "Ne serait-ce qu’en regardant la vie intérieure de l’homme. Il y a beaucoup de tension, de souffrance intérieure qui s’exprime à travers cette augmentation du nombre de dépressions, de syndromes anxieux, de burnouts, à travers l’explosion de la consommation de certaines substances, à travers la solitude qui gagne nos villes. Mon propos n’est pas de noircir la réalité, mais de voir ce qui dans la réalité est noir de façon à pouvoir l’accompagner et y remettre davantage de vie. Et cela passe par prendre soin de son âme aujourd’hui" explique le psychanalyste et biologiste médical, par ailleurs président d’honneur de l’association "Aux captifs la libération", et auteur de "Prenez soin de votre âme" (éd. du Cerf).
C’est un fait pour Jean-Guilhem Xerri, notre société traverse plusieurs crises. "On parle souvent de beaucoup de crises, économiques, sociales, et morales. Mais il y a une crise fondamentale qui est une crise de l’intériorité. La source de toutes ces crises, c’est qu’on ne sait plus bien qui est l’homme. Cela peut paraître en décalage, mais c’est bien la source. Il n’y a plus de vision partagée. Il y a des visions de l’homme qui le réduisent à un paquet de cellules, ou de neurones. Il y a d’autres anthropologies qui disent que l’homme n’est que soumis à des déterminismes sociaux et que finalement on est le fruit de sa classe, culturelle, sociale etc. Ces visions ne sont pas fausses, mais clairement incomplètes" ajoute-t-il.
Depuis le mois de janvier, la France est engagée dans des Etats Généraux de la Bioéthique. Chacun est appelé à s’engager, à y participer, à donner son avis. La question posée par les organisateurs est : quel monde voulons-nous ? Pour Jean-Guilhem Xerri, cette question est une bonne question. "Il me paraît sain et salutaire qu’une société se pose pour réfléchir à cette question qui en amène beaucoup d’autres. J’engage chacun à sa place, à s’intéresser à cette question. Ce n’est pas qu’une question de spécialistes. Lisons, écoutons, intéressons-nous" précise le psychanalyste.
L’Eglise catholique s’est engagée pleinement dans ces Etats Généraux de la Bioéthique. "Cela serait totalement anormal et incompréhensible que l’Eglise ne s’engage pas dans ces questions puisqu’entre autres, la tradition chrétienne porte une espérance, celle de la résurrection. Elle porte une colonne vertébrale qui est le service de l’autre, mais elle porte aussi une vision de l’homme, et c’est caractéristique de la tradition chrétienne. L’Eglise est à sa place, et porte une vision de plusieurs siècles" lance encore Jean-Guilhem Xerri.
Ce dernier est président d’honneur de l’association "Aux captifs la libération", qui porte assistance et soutien aux personnes de la rue. Parmi elles, des réfugiés, et des migrants. Des personnes qui font l’objet d’un projet de loi qui sera présenté mercredi en Conseil des ministres, un texte rejeté par plusieurs associations qui oeuvrent en faveur des migrants. "Je pense que dans ce dossier, il faut se méfier des caricatures, dans un sens, comme dans l’autre. On ne peut pas être dans l’angélisme. Et on ne peut pas non plus être dans la politique du chiffre. Ce que je tire de mon expérience, c’est qu’il y a une dimension humanitaire dont on parle beaucoup. Il faut accueillir, mais avec une perspective sur le long terme. C’est ce que rappelle le pape François, et c’est là-dessus que je jugerai l’efficacité de ce projet de loi" analyse Jean-Guilhem Xerri.
Les chrétiens sont entrés dans le temps du Carême. Dans son livre, Jean-Guilhem Xerri dénonce, entre autres, la société de consommation. "La sobriété est un enjeu fondamental aujourd’hui. Dans la perspective de se préparer à la résurrection du Christ, mais c’est aussi un enjeu pour notre équilibre intérieur. Nous avons besoin de sobriété. C’est bien pour cela que toutes les grandes traditions religieuses du monde, y compris non-chrétiennes, appellent à cette sobriété. Le pape François l’a beaucoup développé dans Laudato Si’, en parlant de sobriété heureuse" conclut Jean-Guilhem Xerri.
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