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JO de Pékin 2022 : la fabrique des champions en Chine

Un article rédigé par Baptiste Madinier - RCF, le 4 février 2022 - Modifié le 4 février 2022

Entraînement intensif, recrutement dès le plus jeune âge, mainmise de l’État : la recette gagnante des autorités chinoises pour construire des champions est-elle encore à l'œuvre pour les Jeux olympiques d’hiver 2022 ? On se souvient que lors des JO d’été de Pékin en 2008, ces fabriques de champions avaient été très médiatisées, notamment pour la gymnastique. Pour les sports d’hiver, la Chine a utilisé les mêmes ingrédients, mais avec un peu plus de retard.

Stade National de Pékin, en Chine où s'est déroulée la cérémonie d'ouverture des JO 2022. ©UnsplashStade National de Pékin, en Chine où s'est déroulée la cérémonie d'ouverture des JO 2022. ©Unsplash

JO de Pékin, l'envers du décor

Loin du rêve affiché au départ, les Jeux olympiques d’hiver de Pékin (du 4 au 20 février), font plutôt figure de rendez-vous maudit. Entre stratégie "zéro Covid", boycottage diplomatique et coût écologique, rarement on aura aussi peu parlé de sport à l’approche du plus grand rendez-vous sportif de la planète pour les sports d’hiver. 

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La Chine veut briller autant qu'aux Jeux d'été

Neuf médailles, dont seulement trois d’or à Sotchi en 2014, seulement un champion olympique à Pyeongchang en 2018 : durant la décennie écoulée, la Chine a eu du mal à rayonner aux Jeux d’hiver face aux "pays blancs" du globe comme le Canada, la Norvège, la Suède ou encore les États-Unis. La grand-messe des sports de glisse est plutôt l’apanage des pays dits développés. Face à cette hégémonie, Pékin entend bien se tailler la part du lion lors de ce rendez-vous sur ses terres. Sans surprise, l’objectif pour le pouvoir communiste est bien sûr de concurrencer la puissance américaine sur le terrain, très géopolitique, du sport, mais aussi de s’adresser à son propre peuple.


Comme pour les Jeux d’été de 2008 (100 médailles dont 51 en or), Pékin se donne les moyens de briller. Sauf que pour les sports d’hiver, il a vraiment fallu partir de zéro. Pour construire et entraîner ses équipes, la Chine est donc allée chercher des coachs étrangers, notamment français ou canadiens, qui ont quasiment carte blanche pour fabriquer de futurs champions.

 

L'exemple du snowboardcross

Par exemple, lorsqu’il arrive en Chine en 2019, Mathieu Siboni est chargé de constituer l’équipe chinoise de snowboardcross. "Les candidats venaient de disciplines d’eau assimilables à la glisse : jet surf, kitesurf, planche à voile, etc., témoigne-t-il, les responsables chinois vont piocher dans leur pépinière d’athlètes pour les transposer dans les sports qui les intéressent." L'en traîneur est resté en poste pendant deux ans, jusqu’au début de la pandémie de Covid.


De 60 athlètes présélectionnés, il garde une équipe de 12. "On démarre vraiment avec un volume important pour garder les meilleurs. La plupart sont des mineurs qui sont tout le temps encadrés dans le sport. Souvent, ils ont des parcours familiaux compliqués, ils reviennent rarement dans leur famille et sont pris en charge par la fédération à 100 %. Ils ne vont même plus à l’école, car ils sont dédiés uniquement au sport : ils mangent sport, ils dorment sport et font du sport toute la journée", raconte Mathieu Siboni. "L’idée est vraiment de faire du repérage dès le plus jeune âge pour faire un écrémage avant l’âge de dix ans", abonde Carole Gomez, géopolitologue du sport et directrice de recherche à l’Institut de Relations internationales et stratégiques (IRIS).

Ensuite, il y a des stages au Chili et à Isola 2000 et l'entraînement est intense, digne des fameuses usines à champions. “Il y a des sessions de huit, dix voire quinze heures par jour où les gammes sont systématiquement répétées afin qu’elles soient parfaitement automatisées par ces athlètes” explique Carole Gomez.

 

Des usines à champions

Ces usines à champions ont été très médiatisées en 2008 lors des Jeux de Pékin, mais leur origine est plus vieille. "Avant les années 1950, il y avait une vraie crainte du sport par le pouvoir chinois, car c’était considéré comme une occupation bourgeoise. Mais lorsque le sport est devenu pendant les années 50 un évènement important, vecteur de messages et de puissance sur la scène internationale, il y a un basculement de la Chine. Le sport s'est transformé en outil pour développer sa population et s’affirmer à l'échelle mondiale. L’URSS est passée exactement par le même processus." 

Présente aux Jeux d'Helsinki en 1952, la Chine communiste a ensuite disparu des radars internationaux, reprochant aux autres pays leur reconnaissance de Taïwan. De retour à la fin des années 1970, elle a alors dû rattraper son retard : dès lors ces "usines à champions" ont connu leur véritable essor. "L’idée est de mettre en avant l’ensemble des ressources de l’État pour favoriser les sportifs de haut niveau qui porteront haut les couleurs de la Chine", relate Carole Gomez.

La formule semble donc avoir été reprise pour ces Jeux olympiques d’hiver. "C’est plus récent donc il n’est pas certain que ces usines à champions portent leurs fruits dès cette édition", conclut Carole Gomez. 
 

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