« Les larmes, ça ne fait pas partir le chagrin », explique Eric-Emmanuel Schmitt. L’écrivain à succès, le romancier, l’auteur de théâtre se confie dans un livre sensible, bouleversant, intime. Sa mère est morte.
Il a fallu huit jours pour que son entourage s’en rende compte, cette ancienne sportive de haut niveau, championne de France 1945 en course de vitesse, était normalement en cure. « Comment ai-je traversé une semaine sans déceler que ma mère adorée avait quitté ce monde ? » interroge Eric-Emmanuel Schmitt. Les circonstances sont douloureuses, et le départ d’un proche est toujours un déchirement : « la mort nous laisse sans bonnes répondes », souligne l’écrivain.
Au fil des semaines, il s’agit d’apprivoiser l’absence, de prendre le deuil, de retrouver goût à la vie, mais cela prend du temps : « La joie s’en est allée. Une matinée de printemps a fait partir la joie. Elle a détalé tel un animal sauvage et j’ignore où elle s’est réfugiée… », écrit l’orphelin.
L’écriture qui le tient debout, et la mémoire aussi : « Malgré sa puissance, la mort ne fait rien mourir d’hier, les souvenirs demeurent intacts », dit-il encore. « Ma mère ne me voulait pas seulement en vie, elle me voulait heureux. Envers elle, j’ai un devoir de bonheur. »
Et si le bonheur ne se décrète pas, il se travaille, patiemment. Eric-Emmanuel Schmitt soulève les ombres du passé, ravive les douleurs familiales, mais cherche aussi la lumière, du côté de l’écriture, c’est vrai, de son entourage aussi, du théâtre en poursuivant sa tournée de « monsieur Ibrahim », alors même que, bizarrement, sa santé vacille. En fait, il applique une dernière fois la volonté maternelle : « Mets-toi toujours du côté de la vie ».
Mais qui ne masque pas le découragement, la fatigue, la déprime qui paralyse ce colosse de la nature, travailleur infatigable, soudain mis KO par la mort maternelle. « Maman est morte ce matin et c’est la première fois qu’elle me fait de la peine », écrit-il d’un trait de plume. Les phrases se succèdent en de petits paragraphes, comme si le souffle manquait, parce que les idées se succèdent comme de petits pas pour avancer, sans nier l’épreuve, sans brusquer.
L’écriture d’Eric-Emmanuel Schmitt est toujours sensible, patiente, portée d’un souffle qu’il ne perçoit pas au moment du deuil mais qui peut nourrir ceux qui traversent une même épreuve. Oui, c’est plein de bons sentiments, et c’est ce qu’on peut souhaiter de mieux dans ces moment-là. Ce que résume cette citation du philosophe Alain : « Ce qu’on peut faire de mieux pour ceux qui nous aiment, c’est encore d’être heureux. »
Journal d’un amour perdu, d’Eric-Emmanuel Schmitt, éditions Albin Michel, et ce soir, on se retrouve pour votre émission Au pied de la lettre…
Ce soir, à 21 heures, émission spéciale avec Anne-Dauphine Julliand, - vous vous souvenez de son livre bouleversant Deux petits pas sur le sable mouillé : je la reçois pour son premier roman Jules-César, aux éditions Les Arènes.
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