La semaine dernière, un article a été publié dans le supplément féminin de l’Oservatore Romano, le journal officiel du Vatican, dans lequel on décrit le quotidien des femmes religieuses au Vatican. Un article à charge qui explique que ces femmes sont dévalorisées, et même exploitées par les prêtres pour qui elles travaillent.
Monique Baujard est l'ancienne directrice du service Famille et Société à la Conférence des Évêques de France. Elle est également doctorante en théologie et chargée de cours à l’ICP de Paris, et auteure de deux tribunes sur la place des femmes dans l’Eglise, dans La Croix.
Cette dernière avoue ne pas avoir été surprise par cet article. 'La situation des religieuses n’est pas toujours enviable. Il faut bien sûr faire une distinction selon les pays. En France, la situation est certainement beaucoup mieux que dans d’autres pays. Mais les religieuses qui viennent des pays du Sud viennent de culture où les rapports homme-femme sont différents. Cela se retrouve dans l’Eglise, qui n’est jamais à l’écart de la société. Cette attitude est plus marquée dans ces pays là. Et on retrouve des religieuses au service de la maison, de l’intendance de l’évêque. Ou bien ce travail est rémunéré. Ou bien elles ne sont pas rémunérées, et c’est comme si on était en famille. Mais si on est en famille, on est à table, et on ne reste pas dans la cuisine' explique-t-elle. Même si les choses se déroulent plutôt bien en France, en Italie, le rapport entre le clergé et les laïcs n’est pas le même. 'L’Eglise est encore très patriarcale' lance Monique Baujard.
Cet article a été publié dans le journal officiel du Vatican. Le pape s’est exprimé sur le sujet. Les choses semblent évoluer. 'Vous trouvez encore des hommes d’Eglise qui sont de vrais princes, avec tout ce que cela comporte autour, avec des personnes à leur service' précise la doctorante en théologie.
Au sujet de l’égalité des sexes, Monique Baujard rappelle la phrase de Saint Paul: 'Nous ne sommes plus ni homme, ni femme, ni esclave, ni homme libre. Nous sommes tous enfants de Dieu'. 'Cette égalité ne se retrouve pas dans les structures de l’Eglise. Et c’est là où l’Eglise doit faire attention. Car l’image qu’elle renvoie dans le monde peut décrédibiliser l’Evangile qu’elle annonce. On a quand même aujourd’hui une situation qui fait que les clercs sont toujours des hommes. Les femmes n’ont de place dans l’Eglise que celle que les hommes leur laissent. L’article sur les religieuses montre bien que des femmes qui ont un doctorat de théologie peuvent se retrouver du jour au lendemain à faire la cuisine pour l’évêque parce qu’on en a décidé ainsi' analyse encore la théologienne.
Monique Baujard publie jeudi 8 mars une tribune sur le site Internet du quotidien La Croix intitulée 'La femme de Cléophas a disparu !'. En la lisant, on a l’impression que dans l’Eglise, on a gommé la place des femmes. 'J’ai pris cet exemple des pèlerins d’Emmaüs où on ne nomme pas le deuxième témoin, qui selon les exégètes, serait la femme de Cléophas. A l’époque, les témoignages de femmes n’étaient juridiquement pas possibles. Je pense que les femmes ont souvent été gommées pour des raisons culturelles ou juridiques. Il faut tenir compte de ces aspects si on veut juger de cela' précise-t-elle.
Dans l’Eglise actuelle, Monique Baujard précise que ce sont les femmes 'qui font tourner la boutique'. 'Si demain les femmes s’arrêtent de travailler, l’Eglise ne fonctionne plus. Mais elles restent dépendantes des hommes. Ce sont les clercs qui les nomment et si vous ne trouvez pas un homme pour vous nommer à un poste, vous n’avez aucune responsabilité dans l’Eglise. C’est pourquoi je pense qu’il faut institutionnaliser un espace de dialogue où il y aura une place attitrée pour les femmes' demande l'ancienne directrice du service Famille et Société à la Conférence des Évêques de France.
Pas question pour autant d’ordonner des femmes prêtres pour Monique Baujard, qui explique que cela ne changerait rien. 'Le pape a demandé une Eglise synodale, c’est-à-dire une Eglise où on est en dialogue hiérarchie-laïcs-théologiens. Cette idée que le clergé serait supérieur aux laïcs vient d’une conception de la foi où le clergé doit enseigner la foi aux laïcs ignorants. Aujourd’hui on serait plutôt dans une conception de la foi qui fait suite à une rencontre avec le Christ. Et à ce moment-là nous sommes tous en chemin pour le suivre. Et donc nous devons discuter ensemble' conclut l’enseignante à l’ICP.
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