Les députés français ont voté mardi l’article 24 de la proposition de loi sur la sécurité globale qui vise à punir la diffusion d’images de policiers lorsqu’elle a pour but de leur porter atteinte. L’article a provoqué la colère des syndicats de journalistes et d'associations de défense des droits de l'Homme qui y voient une atteinte à la liberté d’expression. Constantin Pavléas est avocat et professeur de droit du numérique et des nouvelles technologies.
"Ce qui est visé ce sont les publications en ligne", estime Constantin Pavléas. Mais il ne comprend pas pourquoi l'exécutif pose cette limite. "Le gouvernement n’a pas communiqué de données. Quel est le risque aujourd'hui ?", s’interroge-t-il.
L'avocat comprend la volonté de protéger les forces de l’ordre. "L'objectif est louable dans une démocratie", affirme l’avocat. Mais "il y a un droit fondamental, constitutionnel, protégé par la charte européenne des droits de l’Homme : le droit d’informer", ajoute-t-il. Ce droit est un contre-pouvoir, une valeur et un principe supérieurs selon l'avocat. "Le droit d’informer est un droit fondamental donc l'article 24 est de la cosmétique législative, une précision qui n’ajoute rien au fond", assure-t-il.
Le débat sur la liberté d’expression a également été relancé après l’assassinat de l’enseignant Samuel Paty à Conflans-Sainte-Honorine le 16 octobre dernier. Des menaces étaient nées sur les réseaux sociaux. Faut-il donc mieux encadrer les plateformes comme Facebook ? Oui, estime Constantin Pavléas. "Il faut pouvoir édicter des règles à un niveau supranational. On peut penser à d’autres organisations comme l’OCDE [Organisation de coopération et de développement économiques, NDLR] qui pourrait aussi s’ateler et édicter des règles pour le fonctionnement des plateformes", explique-t-il. "C’est la désinformation, l’utilisation abusive des réseaux qui porte atteinte à notre démocratie", affirme l'avocat.
Ces réseaux sociaux ont de plus en plus de poids et sont dans une situation de quasi monopole. Les plateformes comme Facebook et Instagram traitent les données de 5 milliards d’utilisateurs chaque jour. "Toute concentration de pouvoir est porteuse d’une menace. On concentre entre les mains de quelques uns le pouvoir. Une démocratie est saine lorsque les pouvoirs sont contrebalancés", explique Constantin Pavléas.
L'avocat plaide donc pour un contrôle des algorithmes qui gèrent les réseaux sociaux. "Nous avons besoin de transparence sur les moyens de contrôle", affirme Constantin Pavléas. Mais ils ne doivent pas entraver la liberté d'expression. Selon lui, au contraire, "ce sont des moyens de contrôler les abus de la liberté d’expression".
La Commission européenne présentera le 9 décembre prochain des propositions pour encadrer les plateformes, et mieux modérer les informations diffusées par leurs utilisateurs.
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