La chasse à l'homme n'est pas terminée en Turquie. Les autorités mettent actuellement tout en oeuvre pour retrouver l'auteur de la fusillade dans une boîte de nuit branchée d'Istanbul, qui a fait 39 victimes dont au mois 27 étrangères, lors de la nuit de la Saint Sylvestre. Lundi soir, la police turque a diffusé la photo d'un suspect. Et dans un communiqué publié plus tôt dans la journée, l'État islamique a revendiqué cet attentat.
"Nous savons que depuis deux ans la Turquie a changé de position vis-à-vis des groupes jihadistes à l’égard desquels elle avait auparavent quelques complaisances. Depuis début 2015, il y a une véritable volonté d’en découdre et de démanteler les réseaux jihadistes qui existent sur le sol turc. Au niveau de la dégradation en Syrie, qui partage une frontière de 900 km de long avec la Turquie, cette dernière a décidé d’intervenir militairement le 28 août dernier dans le Nord-Est du pays avec un double objectif : lutter contre l’Etat islamique et lutter contre les milices kurdes de Syrie qui mènent également un combat assez résolu contre Daech. Ce dernier estime désormais que la Turquie fait partie des "croisés" et la revendication de l’attentat du 1er janvier est assez nette" analyse Didier Billion, directeur de l’observatoire de la Turquie au sein de l’IRIS, l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques.
Daech a en effet revendiqué l’attentat, chose qu’il ne faisait pas auparavent pour des actions menées sur le sol turc. Ce qui indique une tension accrue, explique Didier Billion. "Nous savons que l’Etat islamique revendique toujours ses méfaits dans le monde, sauf en Turquie où il voulait semer l’incertitude en Turquie. Désormais les masques sont tombés, et l’Etat islamique revendique tous ses actes ignobles sur le sol turc" précise le directeur de l’observatoire de la Turquie au sein de l’IRIS.
Des événements qui pourraient influer sur la politique intérieur du président turc. "Erdogan a mis en œuvre une politique liberticide à l’égard de l’ensemble des composantes de la société. Je crains que devant les défis de lutte contre l’Etat islamique, contre les groupes kurdes et contre ceux accusés d’être à l’origine du coup d’Etat manqué, Erdogan ne continue une sorte de fuite en avant que plus personne ne maîtrise" s’inquiète Didier Billion.
Diplomatiquement, la Turquie pourrait alors se chercher de nouveaux alliés, notamment du côté de la Russie. "C’est très clair. Après la brouille qui a duré quelques mois, à l’automne 2015, il y a eu un revirement assez complet l’été dernier puisque la Turquie a réalisé qu’elle était assez isolée sur le dossier syrien et qui lui fallait trouver des aides. La Turquie a opéré un tournant assez spectaculaire, n’exigeant plus le départ de Bachar el-Assad comme préalable aux négociations. Mais cette nouvelle amitié avec Moscou se fait dans un rapport totalement asymétrique, car c’est la Russie qui tient les cartes en main sur le dossier syrien" analyse cet expert.
Sur la présence de l’Etat islamique en Turquie, Didier Billion affirme qu’il s’agit d’une question compliquée, qu’on ne peut pas forcément chiffrer. Il rappelle cependant qu’il y a "trois millions de réfugiés syriens en Turquie, et qu’on peut supposer qu’il existe au sein de ces réfugiés des cellules dormantes de l’Etat islamique, sans compter les Turcs qui auraient été séduits eux-mêmes par les sirènes de l’Etat islamique".
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