C'est l'une des expéditions les plus importantes de ces dernières années. Tara, une goélette à voile de 36 mètres conçue par l'explorateur Jean-Louis Étienne, a largué les amarres il y a huit jours pour sa mission "microbiome" depuis son port de Lorient (Morbihan). Pendant près de deux ans, le bateau-laboratoire parcourra 70.000 kilomètres en Atlantique Sud, le long des côtes sud-américaines et africaines, jusqu’en Antarctique.
Le 12 décembre, date choisie pour le départ, est très symbolique. Ce sont les cinq ans des accords de Paris, qui visaient à lutter ensemble contre le réchauffement climatique. Un accord bancal selon Romain Troublé, directeur général de la Fondation Tara Océan : "Les pays ne sont pas au rendez-vous. L’ambition n’est pas assez forte".
Il y a deux missions pour la fondation Tara Océan : aller explorer la planète dans ce qu’elle a de plus petit pour la raconter ensuite à un très large public. Il s’agit de comprendre tout ce qui est invisible dans le milieu marin, ce qu’on appelle le microbiome, pour comprendre le visible, notre Terre. "On commence à comprendre l’influence des microbiomes sur la santé. Tout ce microbiome c’est l’essentiel du vivant", explique Colomban de Vargas, chercheur au CNRS et coordinateur scientifique de la mission microbiome. Selon lui, il est vital car il nous rend énormément de services, comme respirer ou réguler le climat.
Observer, analyser ce petit peuple invisible de la mer, c’est la mission des 200 scientifiques qui se relaieront à bord de Tara pendant ces deux années, appuyés par une quarantaine de laboratoires.
Avec les marins, il y aura un artiste en résidence, et puis un communicant pour raconter l’expédition sur les réseaux sociaux. Les marins pêcheront du plancton à différents endroits de la planète. "On va faire un tour de l’Amérique du Sud. On va commencer par le Chili où des énormes glaciers fondent et amènent beaucoup d’eau douce. C’est intéressant car ce sont des gradiants qui changent au rythme du changement climatique", explique Colomban de Vargas.
L’équipage qui devait partir en septembre, puis en octobre, pour enfin lever l’ancre le 12 décembre dernier se montre très sérieux avec les protocoles sanitaires. Après six jours de confinement, l’équipage a quitté Lorient sans public. Il en accueillera tout de même au cours de ses 23 escales de cinq à sept jours autour du monde mais dans le respect strict des gestes barrières. Ils ont également emporté avec eux des kits diagnostics.
Il ne s’agit pas pour les marins de garder tout ça pour eux. Cette expédition concerne tout le monde. Un important volet concerne la transmission de leurs futures découvertes scientifiques aux politiques mais aussi aux enfants par le biais de cinq ou six dispositifs pédagogiques menés en parallèle dans des établissements scolaires francophones. Pour Romain Troublé, partager ses recherches est aussi important que la recherche en elle-même. "On a la mission de raconter ces recherches et d'apporter des faits pour que les décisions politiques soient prises sur des enjeux scientifiques plutôt que sur des croyances", affirme-t-il.
La première escale se fera à Punta Arenas dans le sud du Chili. Et le retour de la goélette est prévu en 2022. Pour suivre ses aventures sur les eaux, rendez-vous sur les réseaux sociaux de la fondation Tara Océan.
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