Une vie « foutue », pourrait-on penser… et pourtant pour nombre d’entre eux, un avenir autre va s’ouvrir « Oui, j’aimerais redevenir valide, mais à la seule et unique condition de pouvoir garder mon invalidité dans ma tête ». Ces mots étonnants sont de Philippe Pozzo di Borgo que l’on connait pour avoir inspiré le film Intouchables. Nous l’avons tous encore en mémoire. Lui, dont la vie a basculé à la suite d’un accident en parapente, est passé brutalement du statut de brillant patron d’entreprise hyperactif et mondain à une vie d’homme tétraplégique, marquée par la lenteur, la douleur, l’immobilité, la dépendance.
« J’aimerais bien pouvoir de nouveau marcher, prendre mes enfants dans mes bras, cesser de souffrir - dit-il encore- malgré l’intensité de ce désir, je ne vois pas l’intérêt de retrouver l’usage de mon corps sans bénéficier de tout ce que le handicap m’a apporté ». Et d’ajouter : « Il a fallu que je sois dans un fauteuil avec ma mentalité d’handicapé pour apprécier pleinement le sens de la vie ».
On pourrait le penser, mais cette force de résilience, ce goût de la vie, dont il témoigne, illustrent fort bien les propos d’Olivier Bonaventur dans une tribune de Libération. Il est le directeur de Kerpape, près de Lorient, un centre qui reçoit en rééducation de nombreuses victimes d’accidents en tous genres, qui restent lourdement handicapées. Une fois la colère légitime et nécessaire dépassée, il constate chez nombre des personnes une force étonnante pour se construire un nouvel avenir, un avenir certes différent de ce qu’ils avaient prévu, mais pas moins beau.
« Un projet souvent éloigné des normes de la société - dit-il - mais source d’un épanouissement certain. Un projet qui peut emprunter d’autres chemins éloignés des stéréotypes actuels ». Et de citer les normes de performance, de beauté, de travail, d’intimité, de sexualité, qui sont à envisager de façon nouvelle. Et Olivier Bonaventur de conclure : « ils ne se contentent pas de traverser l’existence, ils la vivent pleinement ».
Vous savez, Stéphanie, Confucius a dit « on a deux vies, et la deuxième commence quand se rend compte qu’on en a qu’une ». Le témoignage de toutes ces personnes dont la vie a basculé pourrait être une invitation à chacun d’entre nous à ne pas attendre l’accident pour en prendre conscience.
D’ailleurs, Philippe Pozzo di Borgo lui-même nous lance en guise de conclusion : « N’attendez pas d’être intouchable pour réapprendre le goût du bonheur ».
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