Mi-avril, à Marche, deux des derniers anciens combattants ont été enterrés : tous deux ont fait la guerre de 1940-45 et ils étaient les derniers à survivre. Ils avaient passé les 90 ans. Ils n'avaient que 14 ou 15 ans, lors de ce conflit mondial, mais déjà, à leur âge, ils étaient des réfractaires, refusant d'obtempérer aux Allemands. Ils ont transmis des messages aux Alliés, les cachant dans les tuyaux de leur vélo, parfois. En 1944, tous les deux, ils sont entrés en résistance. Henri Matterne, un des Rèlîs Namurwès, nous raconte si bien l'histoire d'un autre résistant, dans son très beau livre : Louwis d'èmon l' Pitchou
Jusqu'il y a peu, ces deux anciens résistants, nous les retrouvions à toutes les commémorations du 11 novembre et lors des deux Te Deum, que la ville de Marche organise encore, le 21 juillet et le 15 novembre, jour de la fête du roi.
Après la guerre, notre ami François a été militaire chez les paras et il portait fièrement le béret rouge des commandos. Même si, depuis longtemps, il avait terminé son service militaire, il le portait toujours à tous les rassemblements officiels. Il aimait tellement notre pays, qu'il avait planté un drapeau belge, au milieu de son jardin. Hiver comme été, il restait là. Je parle du drapeau, évidemment. Il ne le changeait que lorsqu'il estimait qu'il s'effilochait.
Il y a peu, un ami m'a raconté cette anecdote, assez incroyable et portant bien vraie. Son voisin est trompettiste à l'Harmonie communale. Dans une chambre de son domicile, juste en face de la maison de François, il répétait des morceaux à jouer au monuments aux morts, lors de la Fête Nationale. Et voilà qu'il interprète le last Post. Au plus vite, notre ami sort de chez lui, vient se planter devant son drapeau et salue les couleurs nationales. Le musicien fait une pause d'une demi-heure. Puis, il recommence sa répétition ; en jouant la Brabançonne, cette fois. Une deuxième fois, François sort au plus vite et vient faire le salut, devant le drapeau belge.
Notre ami trompettiste a vite compris le scénario. Et même s'il furent toujours ami, tous les samedis après-midi, il reprenait le Last Post et la Brabançonne. Et chaque samedi, c'était le même spectacle, des mois durant. François n'a sans doute rien compris à ce qui se passait là. J'ai même l'impression qu'il ne s'est jamais rendu compte de rien. Toujours est-il, que le jour de son enterrement, son ami voisin a joué pour lui, une dernière fois... et le Last Post, et la Brabançonne. N'est-ce pas beau ?
Par cette chronique, je voudrais rendre hommage à deux grands hommes de chez nous qui, durant la guerre, ont été de grands résistants. D'abord l'abbé André, qui fut vicaire à Namur et qui a sauvé beaucoup de Juifs. Le plus étonnant dans son histoire, c'est qu'il vivait à la Rue de Fer, et qu'il les cachait dans la maison, juste à côté de la Gestapo, installée à la Komandatur. Après la guerre, il fut aumônier de la prison de Namur, derrière la gare, comme on disait. Son histoire a été racontée par Eric-Emmanuel Schmit, dans son très beau livre : "L'enfant de Noé".
Le deuxième, c'est l'histoire du Padre Paternotte, qui fut aumônier de la base de Florennes. Après guerre, lui, il fut aumônier à la prison de Charleroi. Bien souvent, il nous a raconté que le plus pénible fut, pour lui, de conduire des collaborateurs, au peloton d'exécutions.
Ces quelques lignes sont écrites pour que nous n'oublions pas ces hommes, ces femmes, ces jeunes, qui ont risqué leur vie pour notre pays et notre liberté. Une toute, toute, grande reconnaissance à eux tous !
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