Voici la traduction:
Faut-il en rire ou en pleurer ?
Je sais que vous me prenez encore bien pour un arsouille avec mes histoires, capables de gagner le prix du Roi des Menteurs, au concours de la Royale Moncrabeau, ici à Namur. Pourtant ce que je vais vous raconter, je vous l’affirme, c’est la pure vérité. Faut-il en rire ou en pleurer ?
Octavie, que certains connaissent, est venu retrouver son frère, le grand Jules, curé à Meux, quand leur vieille maman est devenue malade. Si vous ne le saviez pas encore, Meux est mon village natal. Quand le curé du village a pris sa pension, dans les années 1995, il est revenu à Marche, habiter dans une nouvelle maison, construite dans le jardin de leurs parents.
Il y a quinze jours, voilà que le corona est passé par là. Leur docteur a rapidement envoyé ces deux vielles personnes à l'hôpital. Elle avait 97 ans, lui 93. Aujourd'hui, Jules se retrouve dans un home, et pour le reste de ses jours.
Mais nous ne sommes pas au bout de l'histoire. Ces deux amis, n'ont que peu de famille, simplement deux neveux et une nièce. Cette dernière, habitant en France, n'a pu revenir pour les funérailles. Un autre neveu et sa famille étaient en quarantaine. Aux funérailles, ils n'étaient que quatre : le dernier neveu et son épouse, ainsi que deux voisins. Quand je pense étaient si engagée avec tant de personnes de Meux ou de Marche, elle s'en est allée sans son frère, avec qui elle a vécu 50 ans, et pas même la moitié de sa famille. Beaucoup qui l'appréciaient n'ont pas daigné se déplacer par peur. Et comme il était écrit sur le journal que l'on ne pouvait être à l'église à plus de 15 personnes, ils n'ont pas osé venir. C'en est à pleurer !
Comme j'en ai déjà parlé au mois de mars, cela fait mal à beaucoup ce qui arrive aujourd'hui. Les personnes sont habités par la peur. Ils n'osent aller visiter un ami, rendre hommage quand quelqu'un décède. Ils se renferment en leur maison. Et je ne parle pas de tous ce qui se passe une nouvelle fois dans nos hôpitaux ou dans les maisons de repos.
Nus le remarquons, nous les curés, la deuxième vague du virus, est bien plus sévère que la première. Nous le voyons à tous les enterrements que nous avons à célébrer. J'en ai 13 en trois semaines ; mon ami, le doyen de Dinant, lui, avec son vicaire, en ont célébré 18 sur 10 jours. Et les médecins nous prédisent que nous ne sommes pas encore libérés de cette maladie.
Alors, comment fêter Noël et le Nouvel An, sans demander que l'on fasse encore plus attention qu'auparavant ? Il ne faudrait tout de même pas que le virus se répande encore plus fort. Quand nous voyons les conséquences, il y a de quoi pleurer.
Maintenant, vous ne me croirez peut-être pas, mais il n'y a qu'à moi qu'arrive une aventure, comme celle que je vais vous raconter. Pour commencer, il vous faut savoir qu'on ne retrouvait ni les dents, ni les lunettes d'Octavie.
Le jour où le docteur a envoyé mes deux amis à l'hôpital, j'étais passé par là pour prendre de ses novelles. Quand j'ai vu le tableau, et Octavie au plus mal, j'ai demandé à l'aide familiale, qui était là, de me donner un morceau de papier, afin de lui demander si je devais appeler le médecin. Et vous savez qu'écrire avec un masque et des lunettes, cela ne va pas ensemble. J'ai donc déposer ces dernières sur la table. Et voici le début de l'aventure. A croire que je n'ai pas de chance ! Les pompiers arrivent au plus vite, et la femme de leur raconter qu'on cherche toujours après ses lunettes et qu'on ne sait pas où elle les a mises. Le docteur de dire : "Mais elle sont là sur la table !" Et voilà Octavie embraquée avec mes lunettes.
Trois jours plus tard, elle décède. Les pompes funèbres sont venus l'emporter... avec mes lunettes dans le cercueil scellé, comme il se doit en temps de Pandémie. Oui, mes amis, Octavie est partie au paradis emportant mes lunettes. C'est le dernier cadeau que j'ai fait à cette femme que j'aimait bien. Comme je vous disais que je n'avais pas de chance !
Et quand j'ai raconter à un ami ce qui m'était arrivé, il n'a rien trouvé de mieux que de me répondre : "Tu as de la chance, toi ! Tu dois voir le paradis en direct, aujourd'hui qu'elle y est entrée avec tes lunettes ! Nous, cela fait des années que nous essayons de le voir, mais en vain. Ah oui, tu en as de la chance !"
Je ne vous dirai pas ce que je lui ai répondu. Ce n'est pas à redire sur antenne. Mais nous avons bien ri.
Comme quoi mes amis, quand un grand malheur survient, il nous arrive même de rire. Et que cela fait du bien !
A la prochaine fois !
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