Le journaliste posait alors la question de la possibilité d’être heureux quand on était hobbit, sa réponse : « Non ! bien évidemment, parce qu’ils vivent dans un bonheur factice, un bonheur qu’ils ont fabriqué de leurs mains. Un bonheur qui n’est jamais le fruit de la rencontre avec l’inconnu. » Il terminait par « il faut parfois apprendre à dépasser ses peurs, comme Frodon, et à renouer avec l’essentiel ». Et l’essentiel pour nos enfants réside sûrement dans l’apprentissage à l’école, retrouver les jeux et les cours de récréation. L’essentiel passe par la possibilité de leur offrir des vacances, qu’elles soient apprenantes ou non. C’est de re-prendre le risque de mettre le nez dehors, de les éloigner du cocon familial. Ce n’est pas de l’inconscience sanitaire c’est de l’urgence éducative.
Tout cela est maintenant dans nos mains d’éducateurs, que nous soyons parents, animateurs de colonie, chefs ou cheftaines. Ce sont nos propres peurs, nos propres inconforts, nos propres incertitudes qu’il nous faut maitriser. Bien sûr il y aura les protocoles sanitaires qui édicteront sur des papiers des règles qu’il nous semblera impossible à mettre en œuvre dans la réalité. Oui, la vie en colo et en camp sera différente cet été, cela demandera une préparation logistique plus importante, des plans A/B/C qui en plus ne verront certainement jamais le jour. On est en crash c’est vrai, on est à 4 semaines des 1ers départs et on attend toujours la fumée blanche des ministères. Oui ce serait tellement plus simple, moins prise de tête, plus rassurant peut-être de lâcher l’affaire, après tout à année exceptionnelle, décision exceptionnelle.
Mais où est passée la confiance que nous avons en nos enfants d’être capable de vivre cette situation inédite et de s’adapter ? Cette confiance que nous avons quand ils partent en explo 2 jours en décidant tout, de leur trajet à leur projet ? Celle que nous mettons dans leurs encadrants en temps normal et que le Covid aurait d’un coup rendu incapable de gérer les aléas ? Où est passée notre espérance que les choses peuvent et vont bien se dérouler ? Notre 1er rôle c’est d’accepter qu’ils nous échappent. C’est se tordre le bide de les voir partir sans maitriser tous les risques, c’est accepter qu’il y ait des risques mais avoir eu l’intention de les identifier et d’y répondre. C’est un appel cette chronique, un appel à nous tous les parents, à nous tous les structures d’accueil : notre 1ère responsabilité c’est de mettre notre énergie à construire les moyens et les solutions pour que chaque camp, chaque colonie, chaque évènement de jeunesse puisse se dérouler malgré le Covid, avec le Covid. Pas de mettre notre énergie à nourrir nos peurs et nos angoisses. Elles sont là, dépassons-les, pour eux. Parce que quand ils rentreront leur sac à dos débordant de vêtements sales, la chemise hors du pantalon, leur foulard crayonné de mille mots de leurs amis, les cheveux en bataille, que vous vous dire une nouvelle fois « c’est fou comme ils ont grandi en 15 jours », vous vous prendrez leur sourire en plein cœur et c’est ce à quoi nous invite le départ.
« S’en aller au hasard sans avoir rien prévu.
Vaincre d’un bond l’obstacle de la route.
Dans un élan de joie, bondir par-dessus la pierre.
Prendre pour refuge l’arbre qui se présente et pour siège, la borne du chemin.
Ne pas craindre la pluie qui ruisselle et que le vent souffle sur nos visages. […]
Ne pas avoir peur du froid qui fait mal aux mains, ni du chaud qui rend si lourdes et si tristes les plantes assoiffées.[…]
S’en aller au hasard… sans rien demander.
Mais accepter, heureux l’offrande de l’heure qui passe, heureux, heureux, le don du jour. »
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