On s’intéresse ce matin à l’une des plus anciennes politiques communes de l’Union, la PAC, la politique agricole commune dont les orientations devraient changer et le budget baisser après le renouvellement du Parlement de Strasbourg. La politique agricole est l’une des premières réalisations concrètes de la politique commune européenne. Mise en place en 1962, elle a un double objectif : permettre l’indépendance des Etats membres et la sécurité alimentaire des peuples. Les explications de Lucien Bourgeois, économiste spécialiste des politiques agricoles et alimentaires, membre de l'académie d'agriculture au micro de Naomi Levannier.
La PAC a longtemps été encadrée par une politique de quotas agricoles définis au niveau européen, et ventilés ensuite par pays puis par exploitation agricole. Ces quotas ont disparu en 2015. Les pays et les exploitations agricoles sont désormais en concurrence frontale pour trouver des débouchés à leurs produits agricoles. Sur le plan des aides la PAC s’articule autour de deux piliers : Il faut distinguer les aides directes aux agriculteurs des aides au développement rural.
Les aides directes aux agriculteurs représentent les trois quart du budget européen. Elles ne sont pas conditionnées au volume produit, mais à la surface de l’exploitation. Concrètement, ces subventions représentent en moyenne 267 euros par hectare, ce qui constitue dans certaines filières la première source de « revenus » de l’exploitation.
En France, 91 % des exploitations touchent une aide de la PAC, avec un montant moyen de 27 000 euros. Quant à l’aide au développement rural, elle ne représente qu’un quart du budget européen. Elle permet de soutenir des projets de développement, l’aide à l’installation de jeunes agriculteurs ou de financer des projets de reconversion, notamment en bio. Pour Lucien Bourgeois ces aides privilégient la quantité à la qualité et ne sont pas adaptées :
La qualité de l’agriculture c’est l’un des enjeux de la réforme à venir de la PAC. Une réforme qui est d’ailleurs bien loin de faire l’unanimité chez les paysans. Bruxelles envisage en effet de donner aux États membres une plus grande marge de manœuvre quant à l’attribution des aides aux agriculteurs. Jusque là, le premier pilier, c’est à dire les aides directes aux agriculteurs étaient pilotées par Bruxelles, tandis que le “second pilier”, les aides au développement durable étaient réparties par les gouvernements.
A l’horizon 2021, la Commission européenne souhaite que les États membres et les régions décident de l’essentiel de la répartition des subventions européennes à l’agriculture. Une « renationalisation » de la PAC en quelque sorte vivement décrié par le principal syndicat agricole en France. Christiane Lambert, présidente de la FNSEA.
Rappelons que la France qui perçoit environ 9 milliards d’euros pour la période 2014-2020 est le premier bénéficiaire de la PAC. On le voit cette réforme de la PAC constitue pour beaucoup un recul, une sorte de retour en arrière qui privilégierait une définition nationale des politiques agricoles. Autre point noir de cette réforme le budget : La réforme envisage de baisser d’environ 15% les aides directes aux agriculteurs. L’enveloppe annuelle de la France passerait ainsi de 9,4 à 8,5 milliards d’euros dans la prochaine PAC. La baisse des subventions risque de fragiliser un nombre croissant d’exploitations agricoles, notamment familiales. Christiane Lambert ne cache pas son inquiétude..
On le voit avec cette réforme c’est la nature même de cette politique agricole commune qui risque d’être remise en cause. Pour Lucien Bourgeois, membre de l'académie d'agriculture, ce qu’il manque pour redéfinir la PAC, c’est un objectif qui serait commun aux agriculteurs comme aux consommateurs :
Et si pour Lucien Bourgeois la santé pourrait être un objectif de la PAC, la présidente de la FNSEA estime pour sa part que la PAC doit viser un triple objectif économique sociale et environnementale.
La France compte aujourd’hui 450 000 exploitations contre 1,6 million en 1970.
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