Cet hiver, les pluies ont fait monter le niveau du Rhône et de la Saône à Lyon, inondant quelques berges, sans pour autant inonder la ville. Et pourtant, si Lyon a été une nouvelle fois épargnée de la montée des eaux, tout s’est joué à une soixantaine de kilomètres en amont sur le Rhône. Pour protéger Lyon, une zone est inondée, volontairement, dans la plaine du Bouchage, dans le Nord-Isère. Héritage d’une loi de Napoléon III, décidée après une crue meurtrière à Lyon en 1856. Cette plaine du Bouchage, composée de 4 communes, est inondée, volontairement, pour faire baisser le niveau des eaux en aval et ainsi protéger Lyon. Mais à quel prix ?
Après 42 jours de pluie sur 56 depuis la mi-octobre, le fleuve a atteint des niveaux inquiétants en hiver : des eaux qui sont montées à plus de 3 mètres. Et donc, face à la menace, la Plaine du Bouchage a été une nouvelle fois inondée volontairement. Mais la plaine n’est pas un simple terrain vague que l’on pourrait inonder sans conséquences. Des habitants se retrouvent les pieds dans l’eau à chaque fois que cette disposition napoléonienne est activée : sur la commune du Bouchage, un peu plus de 600 habitants y vivent à l’année. Parmi eux : Ercole Ghirelli, retraité, et propriétaire d’une maison au Bouchage depuis 60 ans. Et en 60 ans, il en a vu, des inondations : notamment une dont tout le monde se souvient, dans les années 90, une crue centennale. Près de 400 fermes et maisons avaient dû être évacués, dont celles d’Ercole : « C’était un désastre. Dehors, il y avait 10 centimètres de boue, dans la maison, 5 ou 6. Tout était inondé. On a recensé tous les dégâts et on a été indemnisé par l’assurance. Mais on est en colère, parce qu’ils en ont rien à faire d’inonder le Bouchage, Lyon est plus important, mais pas aider ceux qui restent là pendant une semaine sans pouvoir sortir. C’est la colère ».
4 communes sont donc impactés par ces inondations : Brangues, Avenières-Veyrins-Thuellins, Groslée-Saint-Benoit et donc la commune du Bouchage. Une commune qui a la particularité d’être à 98% inondable. Et à chaque inondation du Bouchage, pour éviter que le Grand Lyon soit les pieds dans l’eau, c’est la commune nord-iséroise et le département qui paye les frais, qui sont nombreux. Annie Pourtier est la maire du Bouchage : « L’entretien des routes, des chemins, des fossés, coûte entre 25 000 et 30 000€ par an ». Le Bouchage se sacrifie pour la métropole de Lyon, et paye pour ce sacrifice. La maire du Bouchage, mais aussi le président du département de l’Isère Jean-Pierre Barbier, demande au Grand Lyon de payer sa part. Une solidarité « amont-aval » depuis longtemps sur la table, mais rien ne bouge : « Il faut que la métropole se penche sur la question. Il y a des élus écologistes dans cette métropole qui se revendiquent d’un certain humanisme, et j’aimerais qu’ils aient la même attention portée aux personnes qui habitent le Bouchage et qui mérite toute leur attention » pour Jean-Pierre Barbier, le président du département de l’Isère. La métropole de Lyon, elle, se défausse de ce soutien financier, appelant notamment l’Etat à prendre ses responsabilités dans ce dossier, en abondant plus massivement le fonds Barnier. Un fonds créé en 1995 et qui a pour vocation de subventionner des mesures de prévention ou de protection des personnes et des biens exposés aux risques naturels majeurs.
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