En préambule peut-être, précisons que ce film est à l'initiative du Vatican qui, en bon connaisseur du 7e art, sait que le cinéma n’est pas un média comme les autres et souhaitait un film sur ce nouveau pape, premier américain et premier issu de l’hémisphère sud. Le cahier des charges était donc tentant : un accès illimité aux archives vaticanes, quatre interviews de deux heures sans coupures, et une totale liberté de création pour le réalisateur.
Wim Wenders a relevé le défi. Librement. Après 50 ans de carrière, de nombreux prix en festivals et une longue série de documentaires comme Buena Vista Social Club, Le Sel de la Terre, Pina plus récemment, il dit avoir eu envie de participer à l’action de ce pape qu’il admire ostensiblement.
Il en ressort une œuvre dense et sans contrepoint, mais sincère et qui nous touche indéniablement au cœur et à l’esprit. Le film alterne entre la voix off du réalisateur sur l’état de la planète, les propos pleins de compassion du pape François, qu’il nous adresse droit dans les yeux, et les images de ses déplacements auprès des plus pauvres. Sur tous les continents, face à toutes les souffrances de la terre, mais aussi face aux puissants de ce monde, y compris à la Curie romaine, il porte un regard de père doux et aimant, mais ferme et direct. Comme lorsqu’il condamne le commerce des armes devant les membres du congrès américain ou qu’il met en garde les cardinaux contre leur risque d’Alzheimer spirituel ou encore qu’il réclame la "tolérance zéro" face à la pédophilie.
Ce n’est pas l’homme qui intéresse le réalisateur mais son message. Plus qu’un film sur le pape François, c’est un film avec le pape François. Il n’y a pas de dimension historique (il est encore en activité), pas de volonté de retracer sa vie mais plutôt de s’intéresser à ses actes et à ses paroles, de montrer en quoi il répond aux problématiques du monde d’aujourd’hui, sur la préservation de la création, sur les inégalités de richesses, les migrations ou les violences qu’elles engendrent… Parce qu’"il vit ce qu’il dit", son message est universel et il l’adresse à tous, croyants ou non-croyants. Il nous rappelle que nous sommes tous frères, que nous le voulions ou non, et nous ouvre au dialogue et à la rencontre de l’Autre.
Aucune question n’est éludée, notamment celle concernant les drames de la pédophilie lors de ses traditionnelles séances en avion avec les journalistes, où le pape François réclame la « tolérance zéro ». Mais en plaçant ses pas dans la continuité de ceux de saint François d’Assise, il veut donner au film une dimension intemporelle. À partir des fresques de Giotto et d’images en noir et blanc reconstituées, il nous rappelle la nécessité, toujours présente, de changer notre rapport au monde et de convertir nos cœurs.
Au Festival de Cannes 2017, lors de la conférence de presse annonçant le projet, le préfet pour la Communication du pape lançait l’idée que les anges, présents sur les toits de Berlin dans "Les Ailes du Désir" de Wim Wenders, deviennent les saints patrons du cinéma. Mais était-ce vraiment une boutade ?
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