Avec plus de 7,6 millions de voix, Marine Le Pen (Front National) se hisse au 2e tour de scrutin de l'élection présidentielle. Elle dépasse même le record historique de 2015, pour le 2e tour des régionales (6,4 millions de voix). Mais est-elle assurée pour autant de battre Emmanuel Macron dans la course à l'Elysée? L'analyse de Jean-Yves Camus, chercheur à l'IRIS et spécialiste des nationalismes et extrémismes en Europe.
'En termes de voix c'est une réussite, explique Jean-Yves Camus, mais en pourcentage c'est décevant par rapport aux sondages de début de campagne.' La candidate du Front National était en effet annoncée devant Emmanuel Macron. Désormais elle doit 'consolider son socle de voix.' Le politologue rappelle aussi que l'abstention n'a pas été plus forte que lors des scrutins précédents, une donnée qui n'est pas favorable à Marine Le Pen dont les électeurs sont toujours très mobilisés.
'Marine Le Pen a mené campagne sur l'Europe et la sortie de l'euro, rappelle Jean-Yves Camus. Or son électorat est plutôt mobilisé sur des sujets tels que l'immigration, la situation économique ou la sanction des élus.' Surtout rappelle le chercheur 'il n'y a pas de vote de colère!' Depuis 1984 et l'arrivée des premiers députés frontistes au parlement européen, les électeurs du FN sont sans doute 'en rupture mais ils se reconnaissent dans les affirmations du FN.'
Pour Jean-Yves Camus, les bons scores de Marine Le Pen dans les zones périurbaines et rurales ne sont pas une surprise, c'est en fait le cas depuis les années 1990. Une situation déjà mise en lumière par le politologue Pascal Perrineau. 'Il n'y a pas deux France mais... trois! explique Jean-Yves Camus, car il y a aujourd'hui l'électorat de Jean-Luc Mélenchon.'
Au 2e tour il n'est pas sûr que les électeurs de la France insoumise choisissent la candidate du Front National. 'Beaucoup d'électeurs sont conscients qu'ils seraient marginalisés (...) et puis ce que l'on appelle l'antifacisme fait partie de l'ADN de cette famille politique' analyse le politologue. Si les primo électeurs de Jean-Luc Mélenchon voteront peut-être FN, les plus anciens 'se souviennent de 2002'. Mais le vote en faveur d'Emmanuel Macron ne serait pas facile non plus. 'Il reste une autre option... l'abstention.'
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