Malgré le sursaut engendré par l'accord de Paris, ONG, scientifiques, citoyens, estiment que le gouvernement ne va pas assez vite.
Deux minutes et trente secondes… C’est le temps qu’a consacré Emmanuel Macron à l'écologie, lors de sa conférence de presse le 25 avril dernier, au cours de laquelle il a présenté ses conclusions du grand débat national. Et deux annonces : la création d’une instance chargée de réfléchir à des mesures plus efficaces pour mener à bien la transition écologique. Et la création d'un conseil de défense écologique. Sous la présidence du chef de l'État, seront réunis le Premier ministre et les principaux membres du gouvernement, et ils auront pour mission de s'assurer que l'urgence climatique est au cœur de toutes les décisions politiques.
Mais pour les ONG, ce n'est pas suffisamment concret. C'est ce que nous confiait Isabelle Autissier, la présidente du WWF au moment de ces annonces.
L’urgence climatique ne s’est jamais autant fait ressentir que ces six derniers mois, entre les manifestations de lycéens pour le climat les vendredis et les ONG qui assignent l’État en justice pour son "inaction climatique". Spécialistes du climat, des océans, des animaux, mais aussi chimistes, physiciens ou biologistes, tous alertent sur l’absolue nécessité de changer radicalement notre mode de vie pour tenter d’inverser la tendance.
Mais, pour le climatologue Jean Jouzel, ancien vice-président du groupe scientifique du GIEC, il faut maintenant concrétiser cette prise de conscience.
Et la France n'est pas prête à affronter le "choc climatique" qu'elle s'apprête à subir d'ici à 2050.
C'est ce que dit le rapport de deux sénateurs du groupe du Rassemblement démocratique et social européen : Jean-Yves Roux et Ronan Dantec. Un climat méditerranéen sur la moitié de l’Hexagone, des sécheresses des sols intenses et longues, des phénomènes de submersions marines plus fréquents. Comment y faire face ? Avec quels outils et quels moyens ? C’est l’objet de ce document de 150 pages, rédigé à l’issue de l’audition de 36 experts.
Leur constat est sans appel : les moyens suffisants ne sont pas sur la table, comme nous le dit le sénateur Ronan Dantec.
Un constat partagé par le climatologue Jean Jouzel. Il rédigeait en décembre dernier une tribune publiée dans le Parisien - Aujourd’hui en France, avec l’économiste Pierre Larrouturou, aujourd'hui candidat aux Européennes sur la liste Envie d'Europe.
Tous deux lancent un appel pour un plan européen pour assurer le financement des besoins en matière de transition énergétique en Europe, en Afrique mais aussi sur tout le pourtour méditerranéen. Un projet qui s'appuie sur deux éléments : une banque européenne pour le climat, qui assurerait des prêts à taux zéro aux citoyens des pays européens signataires du traité, ainsi qu'un budget européen pour le climat.
Les deux hommes s'appuient sur un chiffre donné par la Cour des comptes européenne : il faudrait pour toute l’Europe, investir plus de 1 000 milliards d’euros chaque année pour gagner la bataille du climat. Et bonne nouvelle d'après le climatologue Jean Jouzel, l'argent existe.
Les transports, l’habitat, l’aménagement du territoire, l’agriculture et l’énergie sont autant de secteurs où les politiques peuvent avoir un impact à long terme sur les émissions de CO2. Dans leur rapport, les sénateurs Ronan Dantec et Jean-Yves Roux s’interrogent d'ailleurs sur l’adaptation de certains secteurs, comme l’agriculture, ou le tourisme. Ronan Dantec donne l'exemple des stations de ski de moyenne montagne.
Même constat, avec la politique agricole commune, dit le rapport des deux sénateurs qui estiment qu’elle est utilisée pour renflouer les producteurs en cas de catastrophe au lieu de financer un vrai changement de modèle…Ces sénateurs tout comme le climatologue Jean Jouzel soutiennent que des solutions existent, sans que personne n'y perde économiquement et qu'il faut maintenant que les États entrent dans le concret.
Et reste à voir si le conseil de défense écologique qui se tient ce matin permettra ce passage au concret...
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