Depuis 2012, et le projet de loi sur le mariage entre personnes de même sexe, ce sont surtout les catholiques dits de droite que l'on entend dans les médias. Décryptage de Jérôme Fourquet.
Qui sont les cathos dits de droite ? Ceux que l'on entend le plus dans les médias et sur la scène politique depuis quelques années, d'après Jérôme Fourquet. Cet homme de chiffres, et de sondages, consacre un ouvrage au réveil de certains catholiques. Réveil qui va de la réaffirmation publique de leur croyance et / ou de leurs valeurs, à un véritable engagement politique, en passant par un militantisme proche du lobbying. L'essai de Jérôme Fourquet "À la droite de Dieu" (éd. Cerf) a pour sous-titre : "Manif pour tous | Primaires | Migrants | François Fillon | PMA | Sens commun | Chrétiens d’Orient | Marion Maréchal |Catholiques, vers la radicalisation ?".
... mais ils ne sont pas majoritaires (environ 25% des catholiques pratiquants). Lors du premier tour de la dernière élection présidentielle, les catholiques pratiquants ont voté à 14% soit pour Jean-Luc Mélenchon, soit pour Benoît Hamon. 15% d'entre eux ont voté pour Emmanuel Macron - il peut s'agir de "cathos de gauche" mais aussi "d'héritiers de la démocratie chrétienne", qui ont suivi par exemple "le cheminement d'un François Bayrou". Les deux tiers des catholiques pratiquants ont voté soit pour Nicolas Dupont-Aignan, Marine Le Pen ou François Fillon.
Pour @libe ,le danger en France, ce sont les "lobbys catholiques" et leur "influence inquiétante". J'hésite entre fierté, rire et soupir... pic.twitter.com/prP428dRg8
— Abbé Grosjean Ù† (@abbegrosjean) 23 novembre 2016
Les cathos de gauche qu'on entend moins. Jérôme Fourquet observe "un basculement au cours des dernières années, dans la prise de parole publique, politique et médiatique". Les catholiques de gauche "ont tenu pendant des années le haut du pavé", ils étaient "le plus à l'aise pour s'exprimer sur les questions sociales ou sociétales". Mais depuis 2012, un rééquilibrage s'est opéré dans la prise de parole avec la "montée en puissance de voix très droitières ou plus conservatrices dans le monde catholique".
Déposé au Parlement le 7 novembre 2012, le projet de loi sur le mariage entre personnes de même sexe constitue pour Jérôme Fourquet le point de basculement. Avec l'émergence d'une "parole forte" mais aussi une "mise en mouvement" de centaines de milliers de personnes dans les rues. Même si tous les participants à la Manif pour tous n'étaient pas catholiques - et le mouvement s'est dit officiellement non confessionnel. Notons par ailleurs que "tous les catholiques pratiquants ne partagaient pas l'hostilité à cette loi", entre un quart et un tiers y étaient même favorables.
Mais il y a eu "incontestablement un réveil" à ce moment-là. Dû à une "prise de conscience" chez beaucoup de catholiques "du fait qu'ils étaient devenus minoritaires sociologiquement mais aussi culturellement dans la société française". S'ils le pressentaient jusque là, le fait d'être minoritaire "n'avait pas vraiment porté à conséquence". Cette prise de conscience a pour contexte une société "très déchristianisée et où l'islam apparaît comme dynamique".
Une prise de conscience qui ne se traduit pas de la même façon chez tous les catholiques pratiquants ayant une sensibilité de droite. Parler d'un "réveil identitaire", qui peut sembler péjoratif, n'est pas du même ordre qu'un "catholicisme d'affirmation". Par cette expression, l'expert des sondages entend l'idée que l'"on est revenu - et cela peut paraître très suprenant après 15 siècles de chrétienté en France - on est revenu aux temps premiers de l'Église et qu'il faut tout reprendre de fond en comble, il faut ré-évangéliser". Ce catholicisme réaffirmé d'une part et le courant identitaire d'autre part sont "concomitants". Ils sont les manifestations diverses d'une même prise de conscience.
Politologue et directeur du Département opinion et stratégies d’entreprise de l'institut de sondage IFOP, Jérôme Fourquet est l'auteur de nombreux ouvrages sur la société française, il intervient régulièrement dans les médias pour partager le résultat de ses enquêtes.
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