Le Seigneur des Anneaux, de Tolkien, est l’un des dix livres les plus vendus au monde. On estime à 150 millions le nombre d’exemplaires écoulés sur la planète. Une trilogie traduite en cinquante langues pour ce romain fleuve sorti au milieu des années 50. Plus de 50 ans plus tard, les trois films de Peter Jackson ont relancé l’engouement pour l’univers mystique de Tolkien. Un univers au cœur d’une exposition inédite qui se tient actuellement à la Bibliothèque Nationale de France.
"J’ai ouvert le Hobbit à l’âge de 20 ans. Et j’ai tout de suite vu qu’il y avait une influence médiévale dans ses romans. Après le Hobbit, je suis passé au Seigneur des Anneaux, que j’ai beaucoup aimé. Et là encore j’ai vu les influences médiévales" explique le professeur Léo Carruthers, professeur émérite de La Sorbonne, spécialiste de Tolkien, de langue, de littérature et de civilisation anglaises au Moyen-Âge, auteur de "Tolkien et la religion : comme une langue invisible" (éd.PUPS).
Ce dernier tente d’expliquer le succès de cette trilogie, en comparant l’ouvrage à un texte sacré. "C’est la Bonne Nouvelle. C’est une sorte d’Évangile. Tolkien annonce la valeur du sacrifice de soi, des vertus, du courage, du don de soi, de la générosité. C’est une réflexion sur la condition humaine, et notamment le rapport des êtres humains à la mort" ajoute ce spécialiste de l’œuvre de l’écrivain britannique.
Quand il écrit le Seigneur des Anneaux, Tolkien est un professeur à l’Université d’Oxford. Un professeur de langue et de littérature médiévale. C’est un philologue. Il aime les langues, il travaille sur leur origine. "Pour lui, la littérature elle-même est issue des langues. Ce qu’il met en avant dans ses livres, c’est la langue" lance Léo Carruthers. Ce que l’on n’a pas de mal à comprendre à la lecture du Seigneur des Anneaux, où l’auteur a lui-même inventé plusieurs dialectes.
Pour Tolkien, les langues et les mythologies vont de pair. Il regrettait d’ailleurs que son propre pays, l’Angleterre, n’ait pas de mythologie si développée. Tolkien vouait ainsi une passion pour les mythologies nordiques, celtes, romaines, grecques, égyptiennes. "Son but était de créer une mythologie pour l’Angleterre. Mais le temps ne lui a pas suffit, même cinquante ans. Il a finalement créé une mythologie pour le monde" analyse Léo Carruthers.
Tolkien ne cachait pas sa foi catholique. "C’était un catholique classique européen, d’avant Vatican II. Son œuvre était emprunte de valeurs spirituelles importantes à ses yeux. Mais curieusement, il ne parle jamais de la religion dans ses œuvres. Il faut faire la distinction entre l’homme et son œuvre. Et dans son œuvre entre les valeurs spirituelles et la religion telle que nous la connaissons. Elle n’est pas présente dans l’œuvre" lance-t-il. Une lampe invisible, comme le dit le sous-titre de l’étude de Léo Carruthers.
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