C’est suffisamment singulier pour être souligné et commenté. D’autant plus que « L’humaniste planétaire » selon l’UNESCO, a gardé une fraicheur d’esprit pour penser le monde contemporain et enseigner à vivre, sans être un donneur de leçons.
Il a beaucoup écrit. Comment aborder son œuvre ?
On peut classer ses plus de 70 ouvrages en quelques grandes catégories : la réforme de la pensée ; la pensée complexe dans une approche systémique ; la condition humaine avec une réflexion sur la culture, l’art et le cinéma ; l’éducation avec Les Sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur ; l’écologie, citons La Terre-Patrie et Écologiser l’homme ; la pensée politique ; des réflexions faites sur son parcours d’intellectuel ; des ouvrages autobiographiques.
Quelles leçons tirer de ce qui compte pour lui ?
L’important est de vivre l’aventure humaine avec des risques, en maintenant l’activité de son esprit au contact du monde en mouvement permanent. En 1943, en pleine guerre, il entre dans la résistance, il a 22 ans. Edgar Morin parle aujourd’hui de la fraternitéÌ de la Résistance comme étant parmi les plus beaux moments de sa vie : la fraternitéÌ vécue dans des oasis reliées entre elles comme autant de lieux de résistance et de culture d’une pensée complexe. Pour Edgar Morin, il faut aujourd’hui répondre au devoir de « nous inscrire dans les aventures locales des oasis, arrière-gardes d’humanitéÌ dans les barbaries triomphantes, avant-garde d’humanitéÌ si s’entrevoit la possibilitéÌ d’un futur meilleur » (Edgar Morin, La FraternitéÌ, pourquoi ?)
Au sortir de la guerre, il est illuminé par l’idéologie communiste avec les excès qui lui font croire que la fin peut justifier les moyens, et que la fidélité au Parti vaut plus que la liberté de conscience et d’expression. Mais quatre ans plus tard, il déchante. Il prend alors la profonde justesse d’humanistes comme Camus. Cet épisode fait dire à Edgar Morin, qu’aujourd’hui, « les belles âmes et les grands cœurs, c’est la chose la plus importante qui soit, la meilleure chose au monde ».
Pour Edgar Morin, le propre de la pensée est d’aider à tenir dans la contradiction. Non pas chercher à faire une synthèse pour résoudre les oppositions (la dialectique), mais à vivre dans l’unité des contraires, en les faisant dialoguer (la dialogique). C’est comme cela que l’on trouve le chemin de la sagesse par exemple, en vivant simultanément passion et raison, la « passion régulée par la raison, et la raison nourrie par la passion ».
A 100 ans, Edgar Morin reste animer par les forces de vie, car elles permettent, dit-il, de refouler les angoisses de mort. Il faut s’étonner, devant le spectacle de la vie, devant son mystère. L’écriture et la lecture, la poésie, aident à vivre, et aussi l’amour.
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