La ‘Revue du droit des religions’, éditée aux Presses universitaires de Strasbourg, consacre son dernier numéro à la question de la liberté d’enseignement et de la religion. Un sujet régulièrement repris et discuté lors de chaque rentrée scolaire, symbole de discordances et de flou dans un cadre juridique qui a, lui aussi, ses limites.
Droit de scolariser son enfant dans un établissement public ou privé, choix de la scolarisation à la maison (même si celle-ci a récemment été réduite en soumettant désormais l’instruction en famille à une demande d’autorisation), le cadre juridique français garantit aujourd’hui aux parents une forme de liberté d’enseignement.
Ils peuvent avoir recours, s’ils le souhaitent, à la scolarisation privée. Une spécificité bien française, au sein de laquelle les établissements privés sous contrat ont les mêmes prérogatives que dans le public. Si les programmes sont les mêmes, les activités extrascolaires peuvent en revanche différer, avec par exemple, la possibilité de proposer des cours de religions pour les volontaires, en dehors du socle commun officiel.
Comme le rappelle Françoise Curtit, co-directrice de la Revue du droit des religions et ingénieure de recherche au sein du laboratoire Droit, religion, entreprise et société (un laboratoire CNRS/Unistra), ‘l’enseignement privé fait partie du service public de l’enseignement’.
C’est sans doute là que les choses se compliquent. Financés par l’argent public, ces établissements sous contrat font parfois grincer des dents, notamment parce qu’ils peinent à garantir la mixité sociale imposée en contrepartie par l’Etat. Les familles plus aisées y sont davantage représentées, notamment dans les grandes villes, et les infrastructures sont généralement mieux équipées que les bâtiments publics, plus vieillissants et moins bien dotés.
Si l’Etat rémunère les enseignants de toutes les écoles privées sous contrat, les collectivités locales mettent aussi la main à la poche et assurent les dépenses de fonctionnement (chauffage, matériel, etc.), à même hauteur que pour l’enseignement public. Selon le site Médiapart, la région Grand-Est consacre ainsi 10 millions d’euros annuel pour les lycées privés (pour environ 10% d’élèves scolarisés dans le privé). Une somme utilisée également pour leurs investissements. Une démarche rendue possible tant que ces investissements ne dépassent pas les 10% de dépenses annuelles de chaque établissement. En revanche, ce budget de la Région ne peut concerner que l’enseignement. Exit donc le financement des activités religieuses.
Pour Frédéric Dieu, maître des requêtes au Conseil d’Etat et auteur de l’introduction de ce numéro de la Revue du droit des religions, ‘autorité, complexité et fragilité’ sont trois mots qui définissent bien la situation de la liberté de l’enseignement en France. Pour Françoise Curtit, les règles en la matière manquent en effet de clarté. Les contrôles administratifs et financiers sont encore trop peu nombreux sur l’usage de l'argent public par les établissements privés. La question de la mixité sociale doit aussi être réexaminée. Car à financement public correspond une responsabilité de la part des écoles privées sous contrat. Des engagements face auxquelles elles font trop souvent preuve d’opacité. La liberté de l’enseignement en France incarne toutefois l’héritage de son histoire si riche. La Revue du droit des religions fait un pas de côté en jetant un œil sur le contexte éducatif d’autres pays, à l’image de l’Allemagne ou des Etats-Unis, pays dans lequel aucune éducation nationale existe.
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