“Vous avez dû remarquer qu'en ce moment notre société, par médias interposés , alimente en permanence, une machine à distribuer les claques. Un jour ce sont les enseignants, le lendemain les syndicats, le surlendemain les plombiers, que sais-je encore...
Cette semaine la palme revient aux juges et aux journalistes. Avec ce qu'ils prennent en matière de paires de baffes, ils vont être servis pour un bon moment...
Il faut bien admettre que la campagne des élections présidentielles hystérise les propos des uns et des autres et que la nouvelle structure des médias offre une formidable chambre d'écho à des bulles médiatiques dont l'intensité n'égale que leur caractère éphémère.
Contrairement aux temps anciens, où l'on se regroupait face à la devanture de l'électricien pour suivre les matches de foot sur une télé en noir et blanc, désormais l'information est partout.
Dans notre voiture, la radio n'est plus en option, et notre téléphone portable peut à tout moment nous livrer : de la télé, de la radio ou le contenu de nos journaux préférés.
Désormais l'offre d'information est omniprésente dans l'espace et dans le temps. Et comme la nature a horreur du vide, la question s'est rapidement posée de savoir comment remplir cet espace et comment toucher encore et encore le sacro saint auditeur que nous sommes.
La réponse n'a pas tardé : la chaîne d'information permanente. Assez rapidement ce singulier est devenu pluriel, puisque désormais elles sont quatre ou cinq qui se disputent notre attention, et se livrent quotidiennement à un exercice périlleux.
En effet, les faits sont rares, et les temps d'antenne bien longs. Donc, pour chacune la recette est la même. Des reportages en boucle souvent répétitifs, et dans lesquels le moindre détail nouveau fait l'objet d'une relance sans rapport avec l'importance des faits. A côté des reportages, des commentaires en studio, souvent intéressants, faits par des professionnels et experts compétents, et, qualité rare de nos jours, habiles à nous rappeler que dans l'actualité comme dans la vie, les choses ne sont pas simples. Sans doute l'avez vous remarqué, ce sont toujours les mêmes. Au mieux pour donner l'illusion de la diversité, passent-ils d'une chaîne à l'autre.
Mais l'information c'est comme la chantilly, plus on la bat, plus son volume augment, mais son poids demeure le même.
Alors, faut-il le regretter?
Oui à certains égards, car cette pratique est propice à la création, que j'évoquais au début de mon propos, de bulles médiatiques alimentant la machine à hystériser et à diviser notre société.
Non à d'autres égards, nous sommes entrés dans une nouvelle ère, faite de plus d’instantanéité et d'universalité de l'information mais aussi des la connaissance.
"Le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à venir "disait Gramcsi.
À nous d'en tirer ce que Rabelais appelait " la substantifique moelle", de ne pas être dupes des passions passagères et de garder à tout moment cette belle distance qui est le fruit de notre libre arbitre.
Jo Kerguéris, ancien Sénateur, ancien Président du Conseil Général du Morbihan et ancien maire de Landévant.
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