Un événement qui repose la question de l'avenir du peuple kurde. Rappelons tout d’abord que les Kurdes sont un peuple de 40 millions de personnes de langue indo-européenne et de confession musulmane majoritairement sunnite. Un peuple, depuis les années 1920, dispersé sur quatre Etats, l'Irak, l'Iran, la Turquie et la Syrie et qui lutte pour son autodétermination. Depuis la victoire territoriale contre Daech samedi, les Kurdes sont d’autant plus inquiets pour la suite que les Etats-Unis ont décidé de ne garder sur place que 400 hommes et que les troupes turques n’attendent plus que le feu vert du président Erdogan pour lancer une offensive.
L‘un des problèmes majeurs des Kurdes est donc le fait que président turc assimile les YPG, branche armée du parti de l’union démocratique syrien composée de kurdes, au PKK. Le parti des travailleurs du Kurdistan qu’Ankara considère comme un groupe terroriste. Mais ce n’est pas leur seul problème. En 2011, au moment du début de la révolution syrienne et donc de la guerre, les Kurdes ont plutôt ménagé le régime de Bachar al-Assad comme l’explique François Burgat, spécialiste du Moyen-Orient.
Comme l’indique François Burgat, l’avenir des Kurdes en Syrie va beaucoup dépendre du bon vouloir de Damas et d’Ankara. Les Kurdes sont donc, d’une certaine manière, pris en étau entre le marteau syrien et l’enclume turque. Pour Ziad Majed spécialiste de la Syrie, pour survivre, les Kurdes vont surtout devoir renoncer à nombre de leurs revendications.
Les Kurdes rappellent pourtant aux Occidentaux, Américains et Français en tête, qu’ils les ont soutenu militairement dans la lutte et la victoire contre Daech. Sans eux, en effet, le Califat de l’Etat Islamique n’aurait pas été vaincu. Reste que les Etats-Unis, en retirant une grande partie de leurs troupes de Syrie, et les européens, par leur silence, semblent aujourd’hui se désintéresser de leur sort. Or, pour le géopoliticien Simon Kruk, ce sont biens les grandes puissances, Etats-Unis et Russie, qui détiennent les clefs de la recomposition de la Syrie, et donc aussi, des Kurdes.
L’avenir des Kurdes en Syrie va se jouer ces prochaines semaines. La situation des Kurdes d'Irak est différente. Les forces kurdes ont été décisives pour chasser les combattants de Daech qui avaient investi en 2014 le Kurdistan. Mais, suite au référendum d’indépendance de l’automne 2017 dénoncé par Bagdad et les Occidentaux, les Kurdes ont été contraint d’accepter l’amputation d’un tiers de leur territoire et le contrôle de la plupart des ressources pétrolières. Reste, que le gouvernement autonome kurde est un garant de la stabilité entre les communautés et religions comme en témoigne Mgr Najeeb Michaeel, tout nouvel évêque du diocèse de Mossoul, jumelé avec celui de Lyon.
A noter enfin que les Kurdes ont un autre moyen de pression sur les Occidentaux et Syriens, les 5.000 jihadistes qu‘ils retiennent dans les prisons de leur administration de facto autonome en Syrie. Ils appellent à la création d'un tribunal international spécial pour les juger. Faute de quoi, ces membres de Daech pourraient se retrouver dans la nature.
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