Peut-on vivre toute une vie sans croiser un chrétien, peut-on mourir sans jamais avoir entendu parler du Christ ? Avec de moins en moins de croyants, l’Eglise catholique est interpellée sur sa mission. Déjà, ceux qui marchaient avec Jésus était appelés à être des disciples-missionnaire. Mais comment cela se traduit-il aujourd’hui ? Y a-t-il un effet de mode autour de l’évangélisation ? Est-ce un devoir, une urgence, une joie de faire connaître l’Evangile ? La semaine missionnaire mondiale du 16 au 22 octobre 2023 est l’occasion de revenir sur ces questions.
“Des cœurs brûlants, des pieds en marche ”, c’est l’image des disciples d’Emmaüs, sur laquelle s’arrête le Pape François pour la semaine missionnaire mondiale cette année. En s’inspirant de l’Evangile selon saint Luc, le Pape insiste sur le changement de regard qui s’opère chez les disciples de Jésus quelques jours après sa mort sur la croix.
Troublés, tristes, déçus, ils ne s’attendent pas à revoir celui qu’ils ont pourtant suivi plusieurs années et qui leur a annoncé la Résurrection. Mais lorsque Jésus qui a fait un bout de chemin avec eux, rompt le pain, alors soudain ils le reconnaissent, et se remettent en route pour Jérusalem joyeux, prêts à annoncer que le Christ est vivant. « C’est très intéressant de voir que Jésus envoie ses disciples de son vivant, pour qu’ils expérimentent ce qu’est la mission, une mission dépouillée de tout, et qui n’est centré que sur l’annonce de cet événement fondateur, Dieu s’est fait homme en Jésus » souligne Luc-Emmanuel Dupont, prêtre du diocèse de Lille, curé des paroisses de Villeneuve d’Ascq.
Particulièrement soucieux du défi que constitue l’annonce de l’Evangile, il vient d’obtenir un Master à l’Institut catholique de Lyon, sur le sujet du renouveau missionnaire de l’Eglise catholique en Europe occidentale.
Qui aujourd’hui entend parler du Christ et comment ? La question suscite engouement, engagement, ou agacement. A ceux qui évoquent un effet de mode, les plus enthousiastes répondent en citant le texte Ad Gentes, publié en 1965 lors du Concile de Vatican II.
[« L’œuvre de l’évangélisation étant un devoir fondamental du Peuple de Dieu, le saint Concile invite tous les chrétiens à une profonde rénovation intérieure, afin qu’ayant une conscience vive de leur propre responsabilité dans la diffusion de l’Évangile, ils assument leur part dans l’œuvre missionnaire auprès des nations »]
Extrait d'Ad Gentes, le Décret sur l'activité missionnaire de l'Eglise
Depuis d’autres textes sont parus, dont celui du Pape François en 2013, une exhortation apostolique intitulée « Evangelii Gaudium ». Le Pape détaille les trois champs de la mission : celui de la vie d’une paroisse ordinaire, celui qui s’adresse aux « personnes baptisées » mais éloignées pour une « nouvelle évangélisation », et celui qui concerne ceux qui ne connaissent pas du tout Jésus Christ.
Aujourd’hui, nous ne sommes plus envoyés au bout du monde…mais au coin de notre rue
« Aujourd’hui, nous ne sommes plus envoyés au bout du monde…mais au coin de notre rue. C’est bien ‘une unique mission de tous temps et partout’ » relève le père Luc-Emmanuel Dupont, citant le texte Ad Gentes. Pas besoin d’aller loin, le contexte a changé : 51% des Français ne croient pas en Dieu, selon un sondage réalisé par l’IFOP pour l’association des journalistes d’information sur les religions (Ajir), publié en septembre 2021.
Aussi, face à un maillage territorial creusé comme un gruyère, des groupes entiers de personnes ne connaissent plus Jésus. « Si on veut rencontrer un visage d’Eglise, il faut faire des kilomètres. Alors encourageons les initiatives de laïcs envoyés vers ces personnes ». L’expérience existe déjà, comme à Toulon.
Pour enrichir et nourrir son mémoire, Luc-Emmanuel Dupont témoigne de ce qui se vit chez les Anglicans, de l’autre côté de la Manche. « Depuis les années 90, les Evêques se sont lancés dans une réflexion sur l’évangélisation. Ils ont fondé des communautés à partir de rien. Un véritable dynamisme s’est enclenché pour participer à l’implantation d’Eglise » explique t’il.
Autre inspiration : les évangéliques. Reconnaissant des différences sur la place du baptême, ou de la Bible dans la vie de ces chrétiens, Luc-Emmanuel estime que leurs projets pour s’insérer dans des quartiers, dans la vie associative d’une commune traduisent un désir d’évangéliser. « C’est ce que Jean-Paul II appelait l’échange des dons : nous avons à recevoir les uns des autres pour que ceux qui connaissent le Christ soient de plus en plus nombreux ».
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