Depuis une semaine, l’Afrique du Sud s’embrase. Des pillages et des bousculades ont déjà fait 117 morts selon les autorités. Avec un début de crainte de pénuries.
Dans une récente allocution le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, a souligné le caractère inédit de ces violences depuis l’avènement de la démocratie post-apartheid. Du jamais vu depuis 1990. "C’est une première depuis cette époque. Ce sont des violences émeutières. C’est la première fois qu’elles atteignent cette ampleur" explique Thierry Vircoulon, chercheur associé à l’Ifri, spécialiste de l’Afrique australe.
Il semblerait que ce soit l’incarcération de l’ancien président, Jacob Zuma, pour outrage à la justice, qui ait mis le feu aux poudres. "La condamnation de Jacob Zuma a été l’étincelle qui a embrasé la situation. Mais c’est un problème qui dépasse largement la situation de Zuma. Les émeutiers ne sont pas uniquement des partisans de Jacob Zuma, c’est pour cela que la situation est grave" ajoute-t-il.
La Conférence des évêques d’Afrique du Sud a demandé l’arrêt des affrontements, estimant dans un communiqué que ce sont les inégalités sociales qui ont mené à cet embrasement. Ces émeutes se sont étendues en raison de la crise économique. L’économie sud-africaine est de fait dans un état catastrophique. "Cela fait depuis la fin des années 90 qu’il y a une crise économique très profonde, avec un chômage structurel de plus de 20% et une partie de la population qui est inadaptée sur le marché du travail. L’Afrique du Sud est l’une des sociétés les plus inégalitaires du monde" précise Thierry Vircoulon.
La pandémie n’a évidemment pas amélioré la situation. "L’Afrique du Sud a été l’un des pays d’Afrique les plus touchés par la pandémie. Les conséquences sociales et économiques sont très lourdes. On voit bien que cela a été un facteur aggravant d’une situation sociale et économique dégradée. L’Afrique du Sud est entrée en récession avec la pandémie de Covid. C’est l’accumulation de toutes ces difficultés qui a constitué le cocktail explosif que l’on voit actuellement" lance-t-il.
Face à cette crise, les autorités essaient de reprendre le contrôle du terrain. L’Armée a été déployée car la police est totalement dépassée. Le déploiement de l’Armée pourrait ramener le calme dans les provinces concernées par ces émeutes. Ce sont d’ailleurs des phénomènes explosifs assez éphémères. "Mais il est clair que le monde entier a vu quelle sont les difficultés socio-économiques de l’Afrique du Sud. Tout le monde a pris conscience de la gravité de la situation. Il n’y a pas de solution miracle. Les inégalités sont profondes et se sont installées dans le temps. Il sera très compliqué pour le président Ramaphosa de rétablir la situation" conclut Thierry Vircoulon.
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