C’est une sorte de constante dans l’histoire de l’Europe unie. Rien ne se passe, rien n’avance et rien ne se construit hors de la dynamique franco-allemande. Aujourd’hui, sous l’effet des circonstances, la donne a pourtant changé : jusqu’ici, cette évidence restait assez discrète. Mais l’urgence impose, pour marquer une volonté, d’être explicite. La situation de l’Union européenne est suffisamment grave, à l’est du continent notamment (Pologne, Hongrie) pour se passer de précautions oratoires.
Depuis la présidentielle en France et après le discours fondateur de la Sorbonne - où Emmanuel Macron parlait de « refonder l’Europe » - s’est ainsi dessiné un nouvel horizon. En rencontrant la chancelière le 18 janvier dernier à Paris, Emmanuel Macron en a précisé un prérequis à son projet : « L’ambition que nous portons ne peut advenir seule et elle a besoin de se conjuguer avec l’ambition allemande ». Aujourd’hui encore plus qu’hier pour le futur de l'Europe, il n'y a pas d'alternative ni à l'Est ni au Sud.
Cette évidence pour s’imposer plus largement en Europe et enclencher le processus vertueux souhaitable est pourtant suspendu aux négociations en Allemagne entre la CSU, la CDU et le SPD. . Un vote des adhérents du SPD, à l’issue incertaine, est prévu début mars …
Angela Merkel tente d’avancer vers une stabilisation de son autorité. Les bases qui se dessinent semblent solides. Les quelque 600 délégués du SPD se sont prononcés le dimanche 21 janvier, en faveur du projet de la grande coalition et dans ce pré-accord allemand, l’Europe est une tête de chapitre. Le vote au SPD en mars ne portera évidemment pas sur le projet européen et sa réforme mais sur les points durs de l’accord que sont la fiscalité, les conditions de licenciements et l’assurance maladie en Allemagne. Mais l’avenir de l’Europe, les finalités telles que tentent de les dessiner Emmanuel Macron, disposent de puissants soutiens au sein du parti social-démocrate, notamment de son chef Martin Schulz. Il a justifié son entrée dans les discussions sur la grande coalition - après un refus ferme en septembre - par les menaces pesant sur l’Europe.
Pour que cette gouvernance partagée entre l’Allemagne et la France en Europe s’installe vraiment, il faudra pourtant que la France se montre un peu plus diplomate. Emmanuel Macron ne peut pas prétendre seul au leadership. L’économie française est incontestablement moins performante que celle de l’Allemagne. Et les Allemands, aujourd’hui assez à droite, ne sont pas disposés à payer pour les Français. Même sous le poids de l’usure du pouvoir et malgré sa perte de marges de manœuvre, Angela Merkel reste exigeante et continue de se méfier de la précipitation française. Emmanuel Macron cherche logiquement à corriger le tir, sachant que l’autorité de la France dépend de sa capacité à se réformer.
Le couple franco-allemand ne peut être créatif que s’il est équilibré. C’est le prix à payer pour qu’il commence à être acceptable pour les autres membres de l'Union. Qui ne devraient pas trop longtemps faire la grimace. Les Européens ont, par ailleurs, un Brexit à gérer.
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