Emmanuel Macron est-il plus un Bonaparte, un Napoléon III, un Louis-Philippe ? De toute évidence, son arrivée a été "un événement". Comme le dit l'historien Jean-Pierre Rioux : "Ce pays ne s'offre pas tous les jours un événement de cette taille !" Et s'il est trop tôt pour le qualifier ou non d'historique, on peut d'ores et déjà le trouver "exceptionnel". Ne serait-ce que par le côté assez inattendu de son arrivée au pouvoir.
Le discours d'Emmanuel Macron le 8 mai 2016 à Orléans a eu quelque chose de fondateur. Pas seulement parce qu'il s'agissait de la prise de parole officielle d'un ministre socialiste dans une ville dont le maire Olivier Carré est d'une autre famille politique. Encore moins parce qu'il utilisait Jeanne d'Arc - il n'est ni le premier ni le dernier des hommes politiques à l'avoir fait.
"Il y a quelque chose d'inaugural dans le rapport de Macron à Jeanne d'Arc", note Jean-Pierre Rioux. Quand Macron parle d'un "rêve fou" qui "s'est imposé comme une évidence", il fait un parallèle évident entre son parcours et celui de Jeanne d'Arc. Il fait aussi très clairement allusion à sa capacité de rassembler la France. Même pour la médiéviste Claude Gauvard "la comparaison n'est pas abusive". D'un côté comme de l'autre cette idée de "fendre le système" et de libérer les "énergies".
Un homme jeune et que l'on n'avait pas vraiment vu venir : depuis le 14 mai 2017, la comparaison entre Macron et Bonaparte est tentante. "Bonaparte a émergé tout d'un coup dans un paysage très bouleversé", observe Guillaume Goubert, et Emmanuel Macron émerge lui dans une période de bouleversements économiques très profonds.
"Il nous promet lui aussi de rédiger un nouveau Code civil pour les travailleurs, de faire marcher les enfants du siècle au tambour, de rendre leur agilité et leur profit à tous les commerces, et même de réserver la légion d'honneur à ses grognards. Attendons donc sans prolonger la comparaison flatteuse jusqu'à un Waterloo, un Pont d'Arcole nous suffit", écrit l'historien Jean-Pierre Rioux. D'après lui le parallèle entre Macron et Bonaparte peut se résumer à deux points communs : une volonté de pacifier le pays en rassemblant toutes ses énergies et une volonté de renforcer l'État.
"Chaque jour vient frapper à notre porte", dit Emmanuel Macron le 8 mai 2016. Pour Jean-Noël Jeanneney, par ces mots, Emmanuel Macron s'impose en philosophe de l'histoire. Il s'oppose à une vision que certains ont eue de l'histoire comme une fin, où la chute du rideau de fer coïnciderait avec l'avènement d'un monde désormais pacifié et démocratisé. En novembre 2016, Macron a d'ailleurs publié "Révolution" (éd. XO). "Une manière de ne pas utiliser le mot réforme, qui lui paraissait usé."
"Révolution" dit aussi quelque chose de son saint-simonisme, que le président d'ailleurs ne nie pas. Cette école de pensée entre socialisme utopique et pré-marxisme, née de l'influence considérable qu'a eue la pensée du comte de Saint-Simon (1760-1825). On y trouvait une volonté de libérer les énergies et aussi une aspiration à s'occuper de tous ceux que l'époque laisse au bord de la route, comme un élan d'"amour collectif".
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