Et si le marsupilami avait vraiment existé ? En hommage à la créature créée par Franquin, Zidrou et Franck Pé nous proposent une histoire plus réaliste que jamais du marsupilami. La bête nous emmène à Anvers au début des années 50 ou la cruauté des hommes envers les animaux fait écho à la cruauté des enfants entre eux. Un premier tome très sombre mais où la joie, les rires et l’amour ne sont pas absents.
Le Marsupilami est un personnage de fiction, né en 1952 de l’imagination débridée d’André Franquin, dans la série Spirou et Fantasio. C'est d'ailleurs le personnage que Franquin trouvait le plus abouti parmi tous ceux qu’il avait créés. Que cette créature au pelage moucheté à la queue gigantesque (près de 7m de long), à la gloutonnerie célèbre puisse exister, qu’il vienne bien des fins fonds d’une jungle encore inconnue où il pourrait avoir ses habitudes, son nid suspendu et sa petite famille, en a fait rêver plus d'un.
Ce rêve Zidrou et Frank Pé l’ont fait et avec cet album “La Bête” ils nous offrent un marsupilami plus réaliste que jamais et qui loin de vous faire rire devrait plutôt vous fendre le cœur. Dans cet album qui est plus un roman graphique qu’une BD on est très loin de l’univers comique des aventures de Spirou même si les clins d'œil à l’univers de Franquin sont nombreux.
Nous sommes dans le port d’ Anvers au début des années 50, un cargo vient d’arriver avec plus de 20 jours de retard. Dans ses soutes, les restes d’animaux exotiques qu’il transportait clandestinement. Ils sont tous quasiment morts,
tous, sauf un étrange singe à la queue incroyablement longue. Ces gens qui l’ont ramené en Belgique ne sont pas des gens bien, vous l'imaginez et ça, la bête, notre héro, l’a bien compris. La voilà qui s’échappe du port pour s’enfuir plus morte que vive.
Ces images du marsupilami à l'agonie après tant de mauvais traitements sont très fortes. En fait au début de l’album on le voit très peu, une ombre par ci, un bout de queue par là. Et puis il y a cette main ou plutôt cette patte que l’on découvre dépassant d’un grabat, d’un réalisme saisissant... Le marsupilami existe c’est sûr, et c’est Frank Pé qui lui donne la vie… On le découvre d’ailleurs pleine page quelque cases plus loin, très mal en point mais nous sommes au milieu de l’album...
C'est un petit garçon du nom de François qui va leur sauver. Il subit lui-aussi la cruauté des hommes, ou plutôt de ses petits camarades. Sachez que si la bête est le personnage principal , les personnages secondaires, François, sa maman et son instituteur sont tous très réussis et très attachants. Que les auteurs nous offrent une reconstitution très crédible de ces années-là et avec un soucis du réalisme que l’on retrouve jusque dans les expressions en wallon.
C’est un album très sombre presque à contre-pied de ceux de Franquin. Mais il y aura un deuxième tome et on espère que ce sera celui de la résilience, celui ou le Marsupilami retrouvera ses houba et sa joie de vivre. Notez que dans cette noirceur, il y a aussi de la place pour la poésie, la joie et les cœurs qui battent avec une spéciale dédicace pour l’instituteur dont la passion est d'enregistrer les rires des enfants.
La bête est signé Zidrou au scénario et Frank Pé au dessin. Elle est publiée chez Dupuis. Elle vient d’obtenir le prix Albert Uderzo pour les dessins, un prix qui vient d’être relancé par la famille du célèbre auteur de BD alors qu’il n’avait pas été attribué depuis 2007.
Une sélection de bandes dessinées proposée par Stéphanie Gallet.
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