La crise, sanitaire et économique, que traverse notre pays, s’accompagne pour bon nombre de nos concitoyens, comme il était dit lors des Semaines sociales de France, d’une véritable crise de confiance. Alors, en démarrant ce temps de l’avent où nous nous apprêtons à célébrer ce Dieu, qui a une telle confiance en l’homme qu’il va jusqu’à confier l’avenir de son enfant à une famille humaine, arrêtons- nous sur cette notion.
La confiance est pour Jean Bosco le mot clé qui doit caractériser la relation nouée avec les jeunes. "Sans confiance, pas d’éducation possible", aimait-il répéter à ses éducateurs. Et cela vaut, je crois, pour tous les parents, les enseignants, les éducateurs. Car si l’on peut fonder le pouvoir sur la menace, on ne peut fonder l’autorité que sur la confiance. Si on se soumet à un pouvoir, on obéit à une autorité. Obéir, c’est une démarche libre qui consiste à écouter une voix qui a du poids, qui nous rejoint, qui compte pour nous. Toute crise de l’autorité est d’abord, à mes yeux, une crise de confiance…
Mais la confiance ne peut se décréter. Elle ne peut que se construire, ce qui, certes, peut demander du temps. Jean Bosco ne répond mot pas par un grand discours d’ordre pédagogique mais par un simple mot : l’affection. "Sans affection, pas de confiance", ne cessait-il de répéter à ses disciples. Le jeune ne saura établir une relation de confiance qu’avec l’adulte dont il sait le regard de bienveillance porté à son égard. L’art d’exercer une fonction d’autorité consiste, à mes yeux, à savoir faire passer le message : "Je te dis non, parce que je t’aime". "Si j’en avais rien à faire de toi, de ton avenir, je te laisserai faire n’importe quoi. Si je pose cette limite, cet interdit, c’est parce que tu as du prix à mes yeux, que ton avenir m’intéresse !" Le lien de confiance ne peut se tisser que grâce à l’affection. "L’important est que les jeunes se sachent aimés", répétait Jean Bosco à tous ceux qui œuvraient avec lui au service des jeunes en difficultés qu’il accueillait dans ses maisons.
Pour parler d’affection, Jean Bosco utilisait un mot italien, malheureusement intraduisible en français : "amorevolezza". Il s’agit d’une affection (amore) éclairée par la volonté (volezza). Reconnaissons que, de toutes les façons, qu’on le veuille ou non, toute relation humaine, et par là même toute relation éducative, possède une dimension affective. Alors, pour Jean Bosco, mieux vaut reconnaître cette dimension, afin d’être capable de la gérer raisonnablement, plutôt que vouloir la nier. Je suis de ceux qui pensent que si aujourd’hui notre école rencontre de telles difficultés avec des groupes d’adolescents provocateurs, c’est que bon nombre d’enseignants continuent d’être formés à la négation de la dimension affective de la relation pédagogique. On comprend alors la difficulté de la construction du lien de confiance avec les élèves, lien qui me paraît pourtant indispensable à leur progression.
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