Dans Les Grandissants (Labor et Fides), Marion Muller Colard, théologienne protestante, livre une relecture de la parabole du fils prodigue tissée d’un éloge d’un âge que l’on dit ingrat : l’adolescence…Ce temps précieux de conquête de notre souveraineté, où l’on s’affranchit de ce qu’on a reçu.
L’aventure de la foi et l’aventure littéraire ont toujours été intimement entremêlées dans le parcours de Marion Muller Colard. La langue des textes bibliques la touche profondément : elle est fascinée par le choix des mots, les rythmes et les stratégies narratives qui parviennent à nous happer aujourd’hui encore.
Ce qui me touche est l’effort qui a été produit par tous ces auteurs de la grande bibliothèque de la Bible pour dire quelque chose qui leur paraissait impérieux, nécessaire à dire, dans une époque où écrire était matériellement moins accessible qu’aujourd’hui. Je suis touchée par ce geste d’écrire qui leur a coûté beaucoup plus qu’à moi, et qui est donc révélateur d’une brûlure de quelque chose qu’il fallait absolument faire.
Ses études de théologie, qu’elle assimile à une « médecine légale du texte », l’ont armée d’outils intellectuels pour compléter son expérience éminemment sensible des Ecritures. Ces textes n’en demeurent pas moins une énigme qui ne cesse de l’interpeller, de la mettre en route. Alors qu’elle a consacré son doctorat et un livre, L’Autre Dieu, au Livre de Job, c’est la parabole du fils prodigue qui l’a conduite à prendre la plume cette fois. Dans Les Grandissants, Marion Muller Colard propose une nouvelle traduction du texte grec et en livre une relecture personnelle minutieuse et édifiante.
Le départ du fils cadet, davantage que son retour, est au centre des méditations de la théologienne : cette conquête de la solitude, à travers une errance dans une « région lointaine », constitue une étape initiatique fondamentale. A la perte des moyens matériels de subsistance, s’oppose le gain considérable de la souveraineté : le fils prodigue s’est affranchi du père et des « idées reçues ».
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